Le 5 avril 2012, il y’a exactement 11 ans, le consul d’Algérie et 6 de ses collaborateurs sont enlevés à Gao, qui, entre 2012 et 2013 avait été proclamée capitale de l’Azawad, région du nord du Mali contrôlée par le MNLA. L’enlèvement avait été revendiqué plus tard par le « mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’ouest » (Mujao), un groupe terroriste dont l’apparition surprise avait amené à l’époque de nombreux observateurs internationaux à le suspecter d’être une création des services de renseignements marocains. Après l’échec des négociations, le vice-consul, Tahar Touati a été tué alors que le consul, Boualem Saies est décédé en captivité des suites d’une maladie chronique. Le Mujao, qui avait acclamé une énigmatique dissidence avec Al Qaïda au Maghreb islamique, a enlevé en octobre 2011 dans l’ouest algérien, deux citoyens espagnols et une citoyenne italienne. 11 ans après, l’acte dont l’un des objectifs était d’impliquer militairement l’Algérie dans la crise malienne, est revenu à la surface à la lumière d’une interview qu’Abdelmadjid Tebboune a accordé Al Jazeera podcast, une suite de l’entretien télévisé avec le président de la République, diffusé par cette même chaîne, il y’a quelques semaines. C’est la première fois que les commanditaires de cet acte terroriste dirigé contre l’Algérie sont désignés officiellement, même si auparavant des informations opérationnelles avaient accusé nommément le Maroc de manipuler le Mujao. En évoquant la situation chaotique au Sahel d’une manière générale, Abdelmadjid Tebboune a affirmé au média qatari que « la première victime de l’instabilité au Mali c’est l’Algérie ». « Nous sommes le seul pays dont des diplomates ont été enlevés au Mali, dont deux ont été assassinés », a-t-il fait savoir. « Nous savons qui a fait cela, c’est un pays voisin, à travers une organisation terroriste fictive qu’ils ont créée au Mali », a-t-il assuré. Le président de la République n’avait nullement besoin de nommer ce pays voisin. Le Maroc avait été déjà identifié comme un des pays, qui était le plus impliqué dans l’insécurité au Sahel d’une manière générale et au Mali en particulier. Très actifs dans le nord du Mali depuis le début de la crise sécuritaire et politique dans ce pays, les services de renseignements marocains n’ont jamais arrêté de monter des opérations visant à entrainer l’Algérie dans le « bourbier » malien. « Personne ne nous empêchera d’aider nos frères au Mali et nous ne laisserons personne séparer le nord du Mali du reste du pays », a déclaré Abdelmadjid Tebboune, non sans omettre de souligner que l’Algérie et la France ne partagent pas les mêmes points de vue quant à une solution de la crise, qui frappe un des pays les plus pauvres de la planète. « Nous coordonnons avec tout le monde, les Etats-Unis, la France, l’Allemagne, les autres pays européens, pour la sécurité et pour lutter contre le terrorisme et l’extrémisme, mais nous n’avons pas la même vision avec la France, et je l’ai dit au président français », a noté Abdelmadjid Tebboune. Si la France a opté pour la solution militaire, l’Algérie a opté pour une démarche solidaire, économique et sociale. « Nous aussi on avait des groupes terroristes, mais ils n’ont pas arrêté notre développement. Et puis, ce ne sont pas tous les Maliens qui détiennent des armes, c’est un petit nombre », a indiqué le président de la République, qui a tenu à conclure que la situation au Mali s’est aggravée après la désintégration du pouvoir central en Libye.
Mohamed Mebarki
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