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Le vieil imam et  le chat                                                               

Nous vivons depuis quelques jours au rythme des miaulements d’un chat. Ce fameux chat qui a grimpé sur l’épaule d’un imam d’une mosquée de Bordj Bou Arreridj, qui était en train d’accomplir la prière des « tarawih ». Ça ne s’arrête plus. Le buzz est total. La fierté nationale est à son comble. Les Algériens sont aux anges de voir qu’un chat « bien de chez nous », montre un visage aussi « humain » en faisant irruption au mihrab d’une mosquée et en allant manifester son amour/affection à un imam qui le lui rendit bien en le cajolant tout aussi affectueusement. L’image est certes magnifique à voir. Celle du chat qui caressa tendrement la joue de l’imam et celle de ce dernier qui réagit doucement et spontanément tout en poursuivant la lecture du saint Coran. Oui, c’était assurément beau à voir. C’est une image qui nous réconcilie avec la vraie vie. Avec notre nature. Après tout, nous sommes tous des « animaux ». Or, ce délire national autour de cette image mignonne a quelque chose d’anormal. Il est symptomatique d’une société qui a perdu ses repères. Le moment de tendresse entre l’imam et le chat est, à bien réfléchir, une (belle) exception. Dans notre vie de tous les jours, le chat est au mieux, caressé au pire lapidé voire tué. Dans l’imaginaire collectif, le chat est souvent (il y a évidemment des exceptions) perçu comme un animal gênant qui incommode notre confort individuel et/ou collectif. Comme s’il nous dispute notre bien-être d’où les courses poursuites et les violences que nous lui faisons subir. A notre corps défendant, l’image de Bordj Bou Arreridj nous rappelle notre devoir « d’animalité » et de normalité qui consiste à faire preuve de tendresse face à ces créatures du bon Dieu qui ne nous veulent pas forcément du mal, loin s’en faut, pour peu que nous nous leur montrons notre visage humain. Notre imam a été donc simplement « récompensé » pour sa tendresse envers ce chat si reconnaissant. Cette belle image doit s’arrêter là. Inutile d’en faire un roman patriotico- religieux comme si elle était inédite dans le monde. C’est vrai qu’elle fait du bien dans notre monde de brutes. C’est tout. Mais elle ne peut pas, elle ne doit pas cacher nos maux même si CNN et les grands médias du monde s’en sont emparés  pour son côté insolite. Les miaulements du chat de Bordj Bou Arreridj ne doivent pas cacher le tournis que donnent les 350 dinars du prix de l’oignon. Ni celui de la voiture Fiat. La belle image qui a fait le tour du monde ne doit pas nous faire oublier ces autres images hideuses de nos enfants recrachés par la mer après s’y être jetés dans un geste de désespoir… Oui, le chat était beau. L’imam l’était tout aussi. Mais arrêtez d’en faire un « produit » exclusivement « made in Algeria ». Des images comme celles-ci, on en voit tous les jours voire toutes les heures. Revenons donc à nos moutons. L’ennui c’est l’oignon…

Par Imane B.                                                                               

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