L’universitaire Mohamed Abassa vient de tirer sa révérence. Il est décédé jeudi dernier à Paris. Les journalistes, qui sont passés par l’Institut des sciences de la communication et de l’information fin des années 1970 et début des années 1980 se souviennent forcément de lui, notamment durant la période où il avait la direction de cet institut, qui a connu plusieurs réformes en une décennie seulement. Professeur émérite et anticonformiste à la limite de l’extrême, il réussit à marquer toute une génération d’étudiants en journalisme par se forte personnalité. Il était la modestie personnifiée. Son bureau était toujours ouvert aux étudiants, qui le sollicitaient. Après l’ouverture démocratique ayant suivi les douloureux événements d’octobre 1988, il fonda le premier institut de sondage en Algérie qu’il a appelé Institut Abassa et se distingua par ses contributions pertinentes dans la presse algérienne en langue française. Lorsque les Etats-Unis envahirent l’Irak en 2003, il publia un article retentissant dans le journal Le Matin avec un titre très provocateur, mais qui traduisait parfaitement le sentiment de la majorité des peuples arabes. L’article fut intitulé « Le harem de Bush ». A travers cet écrit, il avait dénoncé l’attitude de certains régimes arabes, particulièrement ceux du Golfe. L’histoire retiendra par ailleurs le fait qu’il ait été l’auteur de « Poutakhine » une analyse romancée sur la mal vie de la jeunesse algérienne. Le livre publié en 2009 à Paris fut interdit en Algérie par Bouteflika, qui y avait décelé une critique acerbe de son régime. Il signa ce livre sous le pseudonyme de Mehdi El Djazaïri. S’il a publié ce livre à Paris, c’est tout simplement parce que les éditeurs en Algérie ont hésité à le prendre en charge. « Je n’ai rien inventé, tout y est vérifiable. Le livre relève toutefois pour une partie de la fiction, mais aussi de l’essai », disait-il. « Le texte n’est pourtant pas écrit au vitriol, comme le présentent certains. Je n’insulte personne, mais je m’en prends à ceux qui poussent ce pays à sa perte. Si quelqu’un travaille pour le bien du pays, on ne peut qu’en être solidaire », avait-il expliqué, après la sortie de ce livre. « Cela fait plus de 20 ans que je parcours l’Algérie, j’en connais les moindres recoins. Ce qui m’a touché le plus, c’est de voir le phénomène de harraga prendre l’ampleur qu’on lui connaît aujourd’hui. J’ai pu mesurer l’étendue de la souffrance des jeunes et de leurs parents en les côtoyant de près. Les jeunes qui veulent gagner à la nage l’autre rive ont des raisons de le faire », avait-il souligné lors d’une rencontre en 2009 à Alger. A la suite de son décès, la direction générale de la Communication à la Présidence a tenu à présenter ses condoléances à la famille du défunt et à la corporation des journalistes.
M.M
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