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Coup d’Etat à Niamey : Niger, le temps des  incertitudes

Jusque-là îlot de stabilité et de démocratie dans un Sahel en proie à une instabilité chronique, le Niger vient de sombrer, lui aussi, dans le travers des coups d’Etats. Une période d’incertitudes s’ouvre pour ce pays qui a connu au moins une décennie de stabilité. Mardi dernier, des militaires, membres de la Garde républicaine, dont la première mission est de protéger le chef de l’Etat, ont renversé le président Mohamed Bazoum. Officiellement, le coup d’Etat est justifié dans un premier temps par «une mauvaise gestion» des affaires économiques et sociales. Depuis hier, les putschistes ont expliqué que leur acte était justifié par « la dégradation» de la situation sécuritaire et l’avancée des groupes terroristes. Dans la foulée, ils ont annoncé la désignation du général Abdourahamane Tchiani, chef de la Garde présidentielle, comme président par intérim. Le coup d’Etat au Niger est évidemment dénoncé par le monde entier, à commencer par la France, la Russie, les Etats-Unis et bien sûr par l’Algérie. Dès les premières annonces de ce coup de force de l’armée nigérienne, l’Algérie a réitéré son soutien au président déchu et réclamé le retour à l’ordre constitutionnel. Mais ces appels ne sont visiblement pas entendus et les militaires ont fermé les frontières du pays, instauré l’État d’urgence et imposé un couvre-feu dans les grandes villes. Sur le plan politique, ce coup d’Etat au Niger va certainement chambouler toute la géopolitique du Sahel. « Le Niger va de facto perdre son rôle d’Etat-pivot sur lequel comptaient beaucoup l’Algérie, la France et l’Union européenne dans le cadre de la lutte contre les groupes terroristes », a commenté Djallil Lounnas, professeur spécialiste du Sahel à l’Université américaine de Salé. En plus des troupes françaises qui sont installées dans ce pays après le départ des derniers soldats de ce pays du Mali, d’autres pays collaborent en effet avec Niamey dans la lutte contre les groupes terroristes et les contrebandiers et l’Algérie est en première ligne puisque les deux pays partagent une longue frontière. En plus de la gestion sécuritaire, l’Algérie et le Niger ont de tout temps collaboré dans la gestion du dossier de l’émigration clandestine. Le Niger fait partie, en effet, des rares pays qui acceptent de reprendre volontairement ses nationaux renvoyés par les autorités algériennes. Cela se fait dans le cadre d’une politique de « respect de la dignité des migrants ». Mais pour tenter de juguler le phénomène, l’Algérie a adopté une politique visant à aider certaines régions de ce pays, qui compte parmi les plus pauvres du monde, avec des projets de développement intégrés. Ainsi, dans le cadre de l’action de l’Agence algérienne de coopération internationale, le Niger devait bénéficier de certains projets de proximité comme des écoles, des centres de soins ou encore des forages. Cela ne règle pas forcément les problèmes de ce pays, mais peut aider à la création de certains emplois et, partant, à la limitation de la migration clandestine. Sur le plan économique, l’Algérie collabore avec son voisin du Sud-Est dans les efforts visant à exploiter le pétrole, nouvellement découvert dans le pays. La Sonatrach dispose, via sa filiale internationale, de champs pétroliers qu’elle a découvert dans le pays. Cela devait permettre à Niamey de diversifier ses ressources en devises, générées jusque-là grâce essentiellement à l’Uranium et aux produits agricoles. En plus de cela, l’Algérie a compté sur ce pays pour le passage du gazoduc Transsaharien qui doit acheminer du gaz du Nigeria vers l’Europe. Et notre pays s’est même engagé à financer au moins en partie le coup du passage du gazoduc sur le sol nigérien, comme il comptait financer une partie de la construction de la route transsaharienne qui traverse le Niger pour arriver jusqu’au Nigeria. Tous ces projets font du Niger un pays extrêmement important dans la région du Sahel. Surtout que grâce essentiellement à la stabilité politique que connaît ce pays au moins depuis 2011, son économie est devenue de plus en plus dynamique. La Banque mondiale prévoit d’ailleurs une croissance de 7,2% pour cette année et plus de 12% pour l’an 2024. Le taux de pauvreté a été réduit de plus de 6% en une seule année, de 2021 à 2022. Ces efforts devaient se poursuivre et devenir importants avec le début de l’exportation des hydrocarbures. Mais cela risque de ne pas se produire. Car, l’entrée du pays dans l’instabilité politique ne permettra pas aux investisseurs étrangers de continuer à prendre des risques. L’économie du pays va être durement impactée et des projets internationaux, à l’image du gazoduc Transsaharien, peuvent être remis en cause si les nouveaux maîtres du pays ne donnent pas des signaux positifs à la communauté internationale, à commencer par l’Algérie.

Akli Ouali

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