« Personne ne peut dire avec certitude ce qui se passera demain ». C’est avec ces propos que le ministre algérien des Affaires étrangères a résumé la situation au Niger, dans un entretien accordé au journal The Washington post, qui a été publié hier. « La situation est très, très instable et nous devons y faire face non pas au jour le jour, mais heure par heure », a souligné Ahmed Attaf avant d’affirmer que « des consultations sont en cours entre de nombreuses parties intéressées et concernées la CEDEAO, les parties au Niger, l’Union européenne, pour voir quelle sera la meilleure option qui s’offre à nous pour atteindre cet objectif d’une solution pacifique à cette crise ». Interrogé sur l’impact d’une intervention militaire étrangère au Niger dans le but de remettre le président renversé dans ses fonctions, il n’a pas hésité à exprimer son scepticisme quant à la réussite d’une telle opération sans exposer le pays et l’ensemble de la sous-région à des jours incertains. « Je ne vois aucun exemple d’intervention militaire dans des cas comme celui-ci qui ait réussi », a-t-il déclaré. « Personne n’est sûr, même au sein de la CEDEAO, que l’intervention militaire ait une chance raisonnable de succès », a-t-il ajouté. Tout en mettant en garde contre toute intervention, et notamment les risques et répercussions sur toute la région », Ahmed Attaf a rappelé la situation qui prévaut actuellement en Lybie, qui, depuis plus d’une décennie après la chute du régime de Kadhafi n’arrive pas encore à retrouver sa stabilité. « Nous avons dans notre voisinage l’exemple de la Libye qui s’est avéré catastrophique pour toute la région, et nous en payons le prix », a-t-il soutenu, avant de préciser que « ceux qui ont mené l’intervention étrangère ont quitté le pays ». « Et ils nous ont laissés avec cette tragédie, avec cette crise sur les bras » a-t-il indiqué. A propos de la Cédéao et ses menaces d’utiliser la force, le chef de la diplomatie algérienne a affirmé que même au sein de cette sous-organisation africaine, « nul n’est sûr que l’intervention militaire ait une chance raisonnable de succès. « Vous pouvez déclencher une intervention militaire, mais vous ne savez jamais comment elle se terminera. Ils sont donc très prudents. Ils font preuve d’un maximum de retenue face à cette option, et ils ont raison de le faire » a-t-il reconnu. Quant aux sanctions économiques prononcées contre le Niger, il n’a pas hésité à exprimer les réserves de l’Algérie par rapport à une telle décision. « Nous avons de très fortes réserves. Dans cette région, le Mali et le Niger, des populations du côté nigérien de la frontière, viennent se faire soigner dans nos hôpitaux. Ils se déplacent dans notre pays pour le commerce, le tourisme, les produits vitaux. Comment pouvez-vous appliquer des sanctions à cela ? Vous fermez votre frontière et dites aux gens : vous devez mourir de l’autre côté, vous n’avez pas accès à mes hôpitaux. Qui peut faire ça », s’est-il interrogé. « Ce sera une action punitive contre la population », a-t-il rétorqué. Tout en réaffirmant la position de l’Algérie, Ahmed Attaf a évoqué également la situation délétère du Sahel. « Nous avons vraiment affaire dans la région à des armées de terroristes qui menacent directement le Burkina Faso, le Mali, certaines régions du Tchad et le Niger. Et les Américains sont arrivés à la même conclusion : que la situation est très grave et qu’elle nécessite une forte coordination ou une coopération étroite entre les pays de la zone pour relever ce défi », a-t-il déclaré. D’autres questions comme celle de l’immigration clandestine ont été abordées dans l’interview.
Mohamed M
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