Décidément, le monde de la clandestinité semble impénétrable. À Annaba, comme dans les grandes agglomérations, nous assistons aujourd’hui à une évolution inquiétante du trafic en tous genres, y compris aux zones humides protégées, qui n’échappent pas aux pratiques maffieuses. Le trafic de sable, qui cible certaines zones humides d’Annaba, au même titre que celles de Skikda, orchestré par des filières spécialisées agissant de manière similaire à l’organisation criminelle dite « Main noire », aurait atteint des proportions alarmantes, voire excessives. Des résidents des régions limitrophes des zones humides, à savoir le lac Fetzara, une dépression située dans la wilaya d’Annaba englobant trois communes (Berrahal, El Eulma et Chorfa), ainsi que la plaine de Guerbes-Sanhadja, dans la daïra de Benazzouz (Skikda), dénoncent « un trafic de sable sans précédent ». Ils signalent « le va-et-vient incessant de convois nocturnes, principalement composés de semi-remorques excessivement chargés de sable, circulant laborieusement sous le poids de leur surcharge ». Le sable de ces zones humides, distantes d’une vingtaine de kilomètres l’une de l’autre, se raréfie de jour en jour. Il semble être pris pour cible par des filières bien organisées, en particulier dans la zone humide de Benazzouz, dont la sablière est l’une des plus réputées dans le pays, aux côtés de celle d’Erighia d’El Tarf. Selon nos sources, le sable objet de pillage serait destiné à alimenter différents projets de construction pris en charge par des entreprises privées. L’on rapporte des « activités néfastes de réseaux aguerris, alimentant notamment les projets de construction en cours dans les nouveaux pôles urbains de la wilaya d’Annaba (nouvelle ville, pôles urbains Kalitoussa et Aïn Djebara) par le biais de convois nocturnes ». Les experts tirent déjà la sonnette d’alarme concernant le bouleversement considérables des zones humides, allant de l’embouchure du village touristique de la Marsa jusqu’à la plaine de Guerbes-Sanhadja, à l’est du chef-lieu, ou la mafia du sable sévit depuis des années. De même que le lac Fatzara, les zones humides de la daïra de Benazzouz, reconnues pour leurs vastes étendues sablonneuses, un matériau dit de haute qualité et qui serait largement utilisé dans la construction, subiraient un pillage constant. Selon nos sources, des personnes établies sur ces lieux depuis des années exploiteraient illégalement des dizaines d’hectares de sable. L’exploitation anarchique de ces gisements naturels serait indiscutablement un phénomène persistant, constituant une caractéristique malheureuse de la vénérable Russicada. Le pillage du sable, malheureusement toujours de mise, notamment du côté de la zone humide de la plaine de Guerbes-Sanhadja dans la wilaya de Skikda, risque de provoquer une véritable catastrophe environnementale. Bien que ces endroits, comportant une vingtaine de sous-zones humides et qualifiées de complexe, aient été inscrites sur la liste de Ramsar en 2001, le massacre semble se poursuivre, en grande partie à cause des activités néfastes des filières spécialisées. Couvrant une superficie totale d’environ 50.000 hectares, dont environ 30.000 hectares de marécages, la zone humide de Benazzouz est particulièrement précieuse aux yeux des écologistes pour le maintien de la diversité biologique en raison de la richesse et de la variété de sa faune et de sa flore, selon les zoologistes. Le site en question est une vaste plaine littorale entièrement recouverte de sable, bordée à l’ouest par les collines côtières de Skikda et à l’est par le massif forestier côtier de Chetaïbi (Annaba). Malheureusement, il ferait désormais l’objet d’une surexploitation de son sable, alimentée par des individus connus dans la région. D’ailleurs, aux yeux de certains experts, compte tenu de l’ampleur du pillage, cette zone a déjà perdu son rôle de « carrefour bioclimatique » et risque de voir sa biodiversité considérablement appauvrie, en raison de la quasi-disparition du massif dunaire de la plaine. Le sable du lac Fatzara, une dépression d’environ 23.000 hectares, dont 16.000 sont totalement inondés toute l’année, située entre les communes de Berrahal, El Eulma et Chorfa dans la wilaya d’Annaba, serait également soumis depuis un certain temps à un pillage systématique. Selon les habitants, les pilleurs, qui seraient nombreux, opèrent ouvertement du côté des communes d’El Eulma et de Chorfa. Ce sable, considéré comme un matériau de haute qualité pour la construction, serait destiné, d’après nos sources, à une certaine classe sociale, à savoir les entrepreneurs voulant construire des villas de luxe.
B. Salah-Eddine
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