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Accès aux archives de la période coloniale : Les « petits » pas de la France

Quelques jours seulement après la polémique ayant surgi suite à l’annonce par la radio nationale du niet opposé par les autorités algériennes à la demande sollicitant l’Algérie à autoriser le survol de son espace aérien par les avions de l’armée française, et le démenti, qui s’en est suivi de la part de l’état-major français, Paris change de fréquence en donnant des signes d’apaisement dans les relations franco-algériennes. Certes, la crise politique au Niger a mis de nouveau sur la table une série de divergences entre l’Algérie et la France à propos des moyens à mettre en œuvre pour le retour à la légalité constitutionnelle à Niamey, mais cela ne semble pas empêcher l’Elysée à donner des signaux de « bonne volonté » visant un règlement progressif du contentieux mémoriel entre les deux pays. En effet, la France vient de répondre positivement aux attentes exprimées par les historiens et les familles réclamant le droit de consulter les archives sur la guerre d’Algérie. « La France va assouplir davantage l’accès à ses archives sur la guerre d’Algérie, en autorisant la consultation des dossiers impliquant des mineurs », selon un arrêté paru hier au journal officiel de la république française. « Le nouvel arrêté supprime donc l’exclusion de consultation des dossiers impliquant un mineur ». Il est à rappeler qu’en décembre 2021, la France avait ouvert, avec quinze ans d’avance sur le délai légal, ses archives judiciaires liées à la guerre, et portant sur la période entre le 1er novembre 1954 et le 31 décembre 1966. Sauf qu’en pratique, l’accès à ces archives demeurait compliqué dans la plupart des cas, en raison de l’exclusion des dossiers impliquant des mineurs – les moins de 21 ans –, selon la législation en vigueur à l’époque, qui étaient soumis à un délai de classification de 100 ans. « Cette gestion bureaucratique conduit à ignorer la réalité d’une guerre menée par des jeunes », avait regretté l’historien Marc André en novembre 2022, dans une tribune publiée par Le Monde. « La méconnaissance historique redouble symboliquement la violence contre un “mineur (…) qui n’a pas été jugé par un tribunal pour enfants mais a comparu devant un tribunal militaire : suffisamment majeur à l’époque pour avoir la tête tranchée, il est aujourd’hui suffisamment mineur pour voir son dossier soustrait de la dérogation générale », s’indignait-il. Malgré cet assouplissement annoncé, d’autres restrictions liées aux informations classifiées, dont la communication « porte atteinte à l’intimité de la vie sexuelle des personnes » ou à « la sécurité de personnes nommément désignées ou facilement identifiables impliquées dans des activités de renseignement ». En mai dernier, Benjamin Stora avait rappelé aux autorités françaises leur devoir de « procéder à des restitutions des archives algériennes », soulignant qu’ « il y a énormément de choses qui ont été transférées de l’Algérie vers la France après l’indépendance de 1962, des kilomètres et des kilomètres d’archives qui sont déposées d’ailleurs principalement à Aix-en-Provence. Donc, la première tâche, à mon sens, c’est déjà de faire une sorte d’inventaire des archives qui existent entre la France et l’Algérie », a préconisé l’historien. Il avait par ailleurs soulevé « la difficulté de se rendre aux archives lorsqu’on habite en Algérie et qu’on n’obtient pas de visa ». « Ça, c’est un vrai problème par exemple, c’est-à-dire qu’il faut commencer à régler ce problème dans la mesure où beaucoup d’Algériens veulent travailler sur les archives transférées. Donc, on doit réfléchir à cette question », avait-il relevé.

Mohamed Mebarki

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