Le débat sur les prétendus « bienfaits » de la colonisation refait surface, après une éclipse relativement longue. Les partisans de ce négationnisme de toutes les souffrances et atrocités, endurées durant des décennies par les peuples colonisés, s’agitent de nouveau en essayant de racoler le plus large possible et d’exploiter les problèmes sociaux et économiques de la population française, à des fins électoralistes évidentes. Leur effronterie n’a d’égal que leur aveuglement et leur obstination à s’accrocher, à ce qu’ils considèrent honteusement comme la suprématie de l’homme blanc (sic). Il s’agit d’une conception raciste, que la droite et l’extrême-droite française s’obstinent à véhiculer et à entretenir, alors qu’Alger et Paris cherchent, depuis un certain temps, à lever tous les obstacles entravant l’aplanissement des divergences autour de la question mémorielle. Cette fois, c’est encore un politicien de l’extrême-droite qui se distingue par ses positions réductrices. Il s’agit de Bruno Retailleau, président du groupe « Les Républicains » au Sénat. Cet individu, qui veut se donner une envergure politique, fait partie des personnalités qui ont appelé publiquement à la révocation de l’accord algéro-français de 1968 sur l’immigration. Il est surtout connu pour son opposition à toute reconnaissance des crimes coloniaux. Selon lui, « il n’y avait pas que des heures sombres ». « C’est aussi des heures qui ont été belles, avec des mains tendues », a-t-il déclaré à une radio française. Alors que les peuples des anciennes colonies françaises en Afrique montent au créneau, pour mettre un terme à cette notion, détestable mais réelle, d’une certaine « Françafrique », pilotée par les nostalgiques d’une Afrique sous tutelle française. Pour lui, les peuples africains n’ont jamais demandé la repentance de la France. « Quand je me rends en Afrique (…) on me dit qu’ils attendent une France qui ne soit pas repentante, qui soit forte et qui assume », a-t-il dit. Pour lui, « c’est l’esprit de repentance qui nous empêche d’avoir une relation franche et loyale avec les pays africains ». Toute cette diatribe entre dans le cadre de cette vieille position d’une partie de la droite française, qui défend que la colonisation a ses bienfaits. En 2005, une loi adoptée sous le président Jacques Chirac a mis à mal les relations avec l’Algérie, en imposant l’enseignement des « bienfaits » de la colonisation à l’école. La loi du 23 février 2005 était considérée comme un texte glorifiant la colonisation car elle stipulait dans son article 4 la reconnaissance des « mérites des combattants français » dans les colonies et imposait que « les programmes scolaires reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord ». L’article en question avait alors été supprimé sous la pression des partis de gauche et d’une grande partie des intellectuels les plus en vue. Dans une réaction aux propos de Bruno Retailleau, Jean-Michel Aphatie, connu pour ses positions anticolonialistes, a riposté en affirmant que « la colonisation, telle qu’elle a existé, c’est une succession de crimes ». « Tout ce que nous avons fait a été effacé par les crimes (…) par le sang que nous avons fait couler ». « C’est l’armée française qui va quelque part, qui impose sa loi, qui fait déménager les gens des terres et ceux qui résistent, ils sont morts », a-t-il dit. C’est en Algérie que la conquête coloniale a été la plus atroce, a-t-il souligné, regrettant que la France ne veuille toujours pas le reconnaître.
Mohamed M
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