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Un ministre au long parcours : Ali Aoun, bête noire de la mafia du médicament

Ali Aoun. La simple évocation de ce nom fait trembler toutes les certitudes, affichées ostentatoirement par cette mafia tentaculaire, qui s’obstine à faire main basse sur l’importation des médicaments. Reconnu pour son expertise en matière de gestion d’entreprise depuis le milieu des années 1970, il a été rappelé de sa retraite en avril 2022, pour diriger la Pharmacie Centrale des Hôpitaux (PCH), avant d’être nommé lors du remaniement ministériel de septembre de la même année au poste de ministre de l’Industrie pharmaceutique. Une charge qu’il a assumée pendant six mois et quelques jours, avant d’être non seulement consolidé dans ses fonctions, mais sollicité officiellement pour prendre une responsabilité plus large, en devenant ministre de l’Industrie et de la production pharmaceutique. A vrai dire, il est l’un des rares ministres actuels, si ce n’est le seul, à se prévaloir du statut de très ancien grand commis, dont la connaissance du secteur industriel public date de 1974, à l’époque où Houari Boumediene était président du Conseil de la révolution et chef de gouvernement. L’opinion publique a appris à connaître cet homme à partir de 1995, en pleine décennie noire, marquée par une vaste opération de démantèlement de ce qui restait d’un secteur étatique fragilisé. En 1995, Saidal était à l’agonie. Ses difficultés financières étaient énormes et ses 2.500 travailleurs étaient sans salaire depuis plusieurs mois. Nommé à sa tête avec une seule mission : la liquidation, Ali Aoun n’hésite pas à emprunter le chemin inverse, au grand dam d’une partie des hautes autorités de l’époque, notamment Ahmed Ouyahia, entre autres, qui voulaient en finir avec Saidal. « Il m’a suffi d’un mois et demi d’audit pour remettre tout à l’ordre », déclarait-il à El Watan en mai 2015. Lors du procès Khalifa Bank, dans lequel il était accusé de « corruption » et d’ « abus d’influence », après avoir sauvé l’entreprise d’une faillite programmée, Ali Aoun n’a pas hésité à porter de graves accusations à l’encontre de la puissante mafia du médicament, que le regain de vitalité qu’a connu Saidal n’arrangeait pas. Son ascension n’est nullement un fait du hasard. La confiance dont il jouit auprès du président de la République n’a absolument rien de mystérieux : elle est basée sur la compétence. Par ailleurs, Aoun est réputé pour être un gestionnaire hors-pair. « Il y a certains laboratoires, que je ne vais pas citer, qui ont corrompu et les pharmaciens et les médecins », avait-il déclaré alors qu’il était ministre de l’Industrie pharmaceutique. Un constat découlant d’un diagnostic précis, établi par quelqu’un qui ne cherche nullement à frapper les imaginations, un haut responsable déterminé à aller jusqu’au bout de sa mission. « Valorisez votre actionnariat, sinon retirez-vous ! », avait-il dit, en s’adressant aux responsables de Saidal. « Il faut trouver des formules nouvelles, des médicaments nouveaux. Dégagez de l’argent pour ça », a-t-il soutenu en s’adressant aux responsables du complexe de Médéa. Homme averti, tout à fait conscient des multiples défis auxquels il fait face, il sait pertinemment que certaines pénuries de médicaments sont montées de toutes pièces par cette mafia, qui ne veut pas lâcher prise. Dans sa réponse à l’Ordre national des médecins dentistes algériens sur la pénurie de l’anesthésie dentaire, il a bien souligné que les perturbations liées à la disponibilité des anesthésiants dentaires ont pour cause la « non-accessibilité dans le pays d’origine, qui était le plus grand fournisseur du marché algérien ». Il a affirmé aussi qu’il a pris « l’ensemble des mesures nécessaires visant la mise en conformité réglementaire des établissements d’importation de ces produits d’anesthésie dentaire ainsi que la mise en place de projet de production de ces médicaments au niveau local ». Concernant l’importation des produits pharmaceutiques, il a rappelé que « l’octroi des quantités à l’importation n’a jamais été arrêté au détriment de la disponibilité ». Il a également expliqué que le visa technique relatif aux importations prévisionnelles est délivré en « tenant compte de la quantification des besoins nationaux, de la disponibilité en produits pharmaceutiques, et le cas échéant en complément de la production nationale conformément à la réglementation en vigueur ». Réussira-t-il à mettre définitivement hors d’état de nuire cette mafia, qui n’hésite aucunement et qui menace la santé des Algériens ?

Mohamed Mebarki

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