Le décès de Houari Boumediene, le 27 décembre 1978, avait laissé la place à une rivalité très attendue par la majorité des Algériens, opposant Abdelaziz Bouteflika, avant sa tombée en disgrâce et le colonel Mohamed Salah Yahiaoui, coordinateur du parti du Front de Libération National (FLN) et homme fort du système à l’époque. Mais quelle ne fut pas la surprise des Algériens de voir apparaitre au-devant de la scène un officier supérieur de l’Armée Nationale Populaire (ANP) que personne n’attendait. Chadli Bendjedid, candidat unique aux élections présidentielles du 7 février 1979, allait prendre la succession de Houari Boumediene pendant douze ans et onze mois. Ses pairs disaient que le choix s’est porté sur lui parce qu’il était le plus ancien dans le plus haut grade de l’armée de l’époque : colonel. Hier, vendredi 6 octobre, était le onzième anniversaire de sa mort, une occasion que la wilaya d’El Tarf a saisi, pour organiser un recueillement à la mémoire d’un président atypique, mis sur orbite sans que lui-même ne s’attende à une telle propulsion, mais qui a fini tout de même par s’imprégner du climat politique, dans un contexte très difficile sur tous les plans. L’Algérie venait de tomber entre les fourches caudines des institutions financières internationales. Le marasme économique allait donner au Fonds Monétaire International (FMI) et à la Banque mondiale l’opportunité de dicter leurs conditions drastiques : moins de public et plus de privé, démantèlement du secteur étatique et ouverture au commerce extérieur. Chadli Bendjedid était tenu à gérer une situation compliquée, marquée par des explosions sociales en Kabylie en 1980, à Constantine et Sétif en 1986, pour aboutir à la déflagration du 5 octobre 1988. Agissant en vrai patriote, il a tout essayé pour concilier les préoccupations populaires et les ambitions d’une nouvelle classe de capitalistes, avide de gagner en puissance. L’avènement du multipartisme, entrainant dans son sillage la libéralisation des champs médiatique, politique et culturel, lui a permis de manœuvrer dans un esprit d’ouverture très remarqué. Sa culture d’ancien maquisard lui dictait une fidélité inconditionnelle à la proclamation de Novembre 1954, en assurant, avec les moyens du bord, la pérennité du rôle social de l’État algérien. Son caractère réconciliateur lui a permis de dialoguer avec toutes les tendances, qui commençaient à se bousculer. Avant que la situation ne se dégrade, il avait fait preuve d’une remarquable ouverture. Mais les choses ont viré au désastre, avec l’entrée sur scène de l’islam radical. C’est d’ailleurs en pleine exacerbation des divergences, qu’il allait tenter de réconcilier l’irréconciliable. L’histoire retiendra de lui l’image d’un président plein de ressources, qui n’abdiquait pas facilement. Sa démission le 11 janvier 1992 est à inscrire dans cet esprit l’ayant toujours animé. On essayé de le dénigrer en utilisant tous les moyens, mais en fin de compte, il s’en est sorti. Que ce soit sur le plan national ou international, l’histoire retiendra de lui de nombreuses positions honorables. Même ses ennemis les plus acharnés ont fini par reconnaitre la justesse de sa conduite.
Mohamed Mebarki
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