La recherche scientifique algérienne n’est plus un vœu pieux. L’université est désormais un immense creuset de compétences de niveau mondial. Connus et reconnus, les travaux de plusieurs chercheurs ayant accompli leur cursus à l’université algérienne, génitrice de cerveaux, sont non seulement brevetés mais font partie de plusieurs domaines de la technologie de pointe. Réalisés par de jeunes équipes encadrées par des professeurs nationaux émérites, les travaux de nos éminences grises sont des références cataloguées parmi les meilleures. Ainsi, des chercheurs du Laboratoire d’Optique Appliquée (LOA) de l’Institut d’Optique et Mécanique de Précision (IOMP) de l’université Ferhat Abbas de Sétif-1 (UFAS), travaillant loin des feux de la rampe, réalisent, après de longues années de labeur, des composants optiques de 9µ à 100µ (microns) de forme particulière et performantes. Cette première du genre est l’œuvre de l’équipe du Pr. Nacer Eddine Demagh, du Dr. AssiaGuessoum et de leurs cinq doctorants, lesquels ont le mérite de travailler avec les moyens de bord. La prouesse des chercheurs de l’UFAS ne passe pas inaperçue et attire l’attention des grands centres de recherche internationaux, lesquels trouvent un malin plaisir à collaborer avec les compétences algériennes et à tout entreprendre pour les enrôler, en leur offrant un pont d’or. Confirmée, la performance donne naissance à des échanges et partenariats fructueux. Soulignons que l’exploit des universitaires de Sétif inverse, le moins que l’on puisse dire, la tendance du transfert de technologie. Un tel transfert n’est plus une relation à sens unique ; nord-sud. Ceci dit, la collaboration avec un laboratoire de l’université de Strasbourg (France) a, dans un premier temps, permis d’optimiser le procédé et la fabrication de deux types de micro-collimateurs (embouts fibrés) destinés aux nouvelles technologies. Elle a ensuite débouché sur une distinction internationale, le deuxième prix de l’innovation à « l’innovation village » organisé par la SPIE (Society of Photo-optical Instrumentation Engineers, ndlr), la plus grandeconférence internationale dédiée à la photonique au monde. Mieux, les résultats des laboratoires rentrent de plain-pied dans le domaine de l’industrie de pointe mondiale.
Des microlentilles « made in Algeria » dans le monde
Sentant le bon filon, la Société d’Accélération du Transfert de Technologie (SATT) et la société « Le verre fluoré » (leader des fibres optiques moyen infrarouge, avec environ 50 % du marché mondial) ont signé, en octobre 2023, une licence exclusive pour l’exploitation mondiale de cette technologie innovante développée par le laboratoire d’optique appliquée de l’IOMP de l’université Ferhat Abbes de Sétif, en collaboration avec le professeur Sylvain Leclerc du laboratoire des sciences de l’ingénieur, de l’informatique et de l’imagerie de l’université de Strasbourg (France). Soulignons que l’innovation récompensée par un prix à la dernière conférence « Photonics Europe » (événement de référence dans le domaine de l’optique-photonique) permettra, grâce à l’intégration de microlentilles, la conception de nouveaux systèmes beaucoup plus performants. L’investissement des sociétés précitées n’est pas fortuit. Sachant que les équipes de recherche algéro-françaises ont levé un frein technologique de taille. En développant Microcurved, une nouvelle technologie inédite ancrée sur l’intégration de microlentilles au cœur des fibres (proche infrarouge), les chercheurs ont mis un terme au système des lentilles classiques engendrant une déperdition de puissance importante, estimée à environ 60 % de pertes. Pour les spécialistes en la matière, l’innovation constitue un outil stratégique pour toutes les activités de spectroscopie, un marché en pleine croissance (+7 % de croissance annuelle pour un chiffre d’affaires de 15 milliards d’euros en 2021 à l’échelle mondiale). A l’instar de ses partenaires français, le Pr. Nacer Eddine Demagh estime qu’une telle innovation est stratégique pour l’environnement. « Grâce à cette nouvelle technologie, il sera possible de détecter des polluants avec une efficacité inégalée. Elle devrait trouver application dans de nombreux domaines (médical, spatial, défense et autres). Cette innovation démontre que la recherche scientifique algérienne est capable de délivrer des réponses pratiques. La nouvelle stratégie du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique est pour beaucoup dans les résultats et performances obtenus par plusieurs chercheurs de l’université algérienne, se transformant de jour en jour en entité industrielle et commerciale », souligne le chercheur. Celui-ci précise que le lancement officiel de cette fibre innovante a eu lieu en juin 2023 à l’occasion du salon européen Laser Munich où le savoir-faire de chercheurs algériens qui s’est traduit par un Brevet international puis un prix se transforme maintenant en certificat d’exploitation devant générer des dividendes, et en devises s’il vous plait !
A. Bendahmane
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