Aujourd’hui à Annaba, en particulier dans la commune de Berrahal, le secteur du foncier, les assiettes foncières, les règles définissant l’urbanisme et le respect du cadre de vie des habitations semblent relever de l’utopie. De nombreuses habitations de luxe auraient été construites dans l’opacité la plus totale, sans le moindre acte répondant aux critères d’accession à la propriété. La situation actuelle à Berrahal est qualifiée de catastrophe urbanistique. Comment expliquer cet état de fait insolite, élevé au rang de loi immuable, sapant les fondements de l’État dans son acceptation la plus large ? Qu’en est-il de ce bouleversement massif du foncier à Berrahal en particulier, et à Annaba en général ? Pendant de nombreuses années (Hirak et Covid-19 inclus), combien de constructions, tant privées que publiques, ont émergé dans une anarchie totale ? Selon des membres de l’Assemblée Populaire de Wilaya (APW), le wali a été saisi concernant un immense trafic foncier au pôle urbain Kalitoussa, où des lots de terrains ont été vendus sans aucun document, aux environs de 200 millions de centimes. À ce rythme, la construction illicite semble avoir un bel avenir devant elle. Avant-hier, jeudi 30 novembre, une opération de démolition d’habitations illicites a été entreprise dans certains quartiers de Berrahal (Aïn Chouga, Tacah et Guirrech), dans le cadre de la mise en œuvre de la nouvelle loi sur l’urbanisme et l’aménagement du territoire. Cependant, il est regrettable de constater que certaines personnes concernées par cette opération n’ont pas dû s’inquiéter. Beaucoup d’habitants estiment qu’il y a eu « deux poids, deux mesures » lors de cette action. En effet, les habitations appartenant à des personnes aux reins solides, ayant fait l’objet de décisions de démolition, n’auraient pas été détruites. En effet, des constructions qui avaient vu le jour il n’y a pas si longtemps, et d’autres en cours de réalisation en plein centre-ville de Berrahal, auraient été « épargnées ». « Cette action n’a finalement touché que les personnes défavorisées qui ont payé le prix fort pour justifier cette opération. Il s’agit là d’un abus qui reflète la loi du plus fort », dénoncent des contestataires, appellant les autorités locales à « dépêcher une commission d’enquête ». Par ailleurs, des notables de la ville souhaitent l’ouverture d’une enquête approfondie sur la commission de daïra chargée de réguler les constructions selon la loi 08-15. Ils précisent à cet égard que des dizaines de logements construits entre 2014 et 2020 ont été régularisés dans l’opacité totale, « en violation de la loi ». Comment la loi est-elle transgressée ? Comment parvenir à ignorer toute la chaîne juridique régissant l’accès à la propriété, les critères d’attribution du foncier, les normes de construction, le respect de l’environnement et du tissu urbain ? La question pertinente n’est pas de savoir pourquoi la loi est transgressée, mais plutôt pourquoi elle n’est pas appliquée pour tous et, surtout, pourquoi elle n’est pas protégée en priorité. Est-ce la loi du plus fort qui prévaut ?
B. Salah-Eddine
Partager :