En d’autres temps, une visite de Louisa Hanoune au président de la République aurait été, somme toute, quelque chose de banal. Un usage qui fait partie des rituels républicains, mettant en présence le chef de l’État avec une figure de l’opposition. Mais la rencontre d’avant-hier lundi, entre l’indéboulonnable présidente du Parti des Travailleurs et le président de la République, revêt forcément une connotation particulière pour les observateurs de la scène politique nationale, car elle intervient à la suite d’un passé et d’un passif. À savoir le passage de Louisa Hanoune par la case prison en février 2020, condamnée à quinze années de prison ferme, mais ramenée à trois ans après appel, dont neuf mois ferme, purgés durant la période de détention préventive. Un tel rappel ne tend certainement pas à réveiller les démons de la discorde, encore moins à jouer les trouble-fêtes. Il s’agit juste de relever le changement de décor, le basculement d’une situation génératrice de conflits à une situation de détente, à la faveur de cette rencontre au palais d’El Mouradia. C’est un événement politique majeur en soi. La télévision nationale, l’ayant fort opportunément mis en relief, en laissant la présidente du PT s’exprimer longuement sur le contenu de ses échanges avec le président de la République. Au menu et comme de juste, la tragédie qui se joue quotidiennement en Palestine (une question chère à Louisa Hanoune), « les menaces qui pèsent sur l’Algérie », dans un contexte géopolitique international et régional miné, ainsi que la « question démocratique ». En se rendant à la présidence de la République pour y être reçue par le président de la République, Louisa Hanoune, par-delà la courtoisie du geste, entend visiblement en finir avec le dialogue de sourds avec le pouvoir et amorcer l’écriture d’une nouvelle page de détente avec ce dernier. Il est fort probable que les messages d’ouverture, lancés à travers les mesures récemment prises par le président Tebboune, en particulier l’adoption d’une nouvelle loi sur les médias avec la fin du délit de presse et la visite de la rapporteuse des droits de l’homme de l’ONU en Algérie, ne sont pas étrangers à la décision de Louisa de « monter » à El Mouradia, pour reprendre langue avec les tenants de la décision politique. Dans la foulée de cette rupture de glace, entre la cheffe du PT et le président de République, verrons-nous bientôt d’autres leaders de l’opposition démocratique lui emboiter le pas, en sollicitant une rencontre avec le chef de l’État ? C’est plus que souhaitable, car le contexte politique interne et externe rend plus que vital le dialogue politique inclusif, pour justement conforter et consolider le front interne.
H. Khellifi
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