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À propos de l’exil des médecins algériens : La surprenante réaction du ministre de la Santé

« Il n’y a aucun exode de médecins ». Cette « sentence », formulée par, Abdelhak Saïhi, ministre de la Santé lors de sa tournée d’inspection et d’inauguration, effectuée hier mardi dans la capitale, a dû très certainement intriguer de nombreux praticiens du secteur, notamment ceux qui se sont intéressés depuis des années à ce phénomène. D’autant plus qu’elle est intervenue moins d’une semaine après la énième alerte donnée par le docteur Lyes Merabet. Celui-ci avait mis en garde contre une nouvelle vague de départs massifs de praticiens, après la publication par les services du ministère français de la Santé d’une liste de médecins étrangers ayant réussi les épreuves de vérification des connaissances, organisées au titre de la session 2023. La nouvelle liste contient un nombre important de praticiens algériens appelés à exercer en France, avait affirmé le président du Syndicat National des Praticiens de la Santé Publique (SNPSP). La sortie publique du ministre de la Santé a tout l’air d’une réplique destinée au syndicaliste. Une réaction pour le moins surprenante de la part d’un ministre, qui s’est contenté de livrer quelques chiffres, sans se donner la peine de les soumettre à l’analyse. Saïhi a affirmé que pas moins de 36.000 médecins généralistes et 18.000 spécialistes exercent dans les hôpitaux, estimant que les médecins algériens qui se sont installés à l’étranger « sont partis de leur propre gré ». Une explication peu convaincante, dans la mesure où elle évacue le fond d’un problème évoqué également par le docteur Mohamed Bekkat Berkani, qui s’était déjà alarmé à propos de ces départs massifs de médecins radiologues, néphrologues, anesthésistes-réanimateurs et psychiatres, tous formés en Algérie. Ce praticien, qui avait parlé d’une « hémorragie cataclysmique », avait déclaré au journal en ligne TSA, que l’Algérie est devenue un pays « exportateur de médecins vers les pays européens, notamment la France ». « Comme dans un marché à ciel ouvert, la France attire de plus en plus de médecins maghrébins, dont les Algériens. Des examens sont régulièrement organisés par les autorités françaises pour accueillir et intégrer des milliers de médecins maghrébins et majoritairement algériens dans toutes les spécialités du système médical français », a-t-il souligné. Lyes Merabet et Mohamed Bekkat Berkani avaient évoqué des conditions socio-économiques difficiles, « qui poussent de plus en plus de jeunes médecins à s’exiler en France ». « Nos médecins ont besoin d’une visibilité sur leur carrière professionnelle », avait estimé le docteur Mohamed Bekkat Berkani. La réaction du ministre de la Santé n’est-elle pas réductrice ? Avant lui, en février 2022, son prédécesseur a tenté de minimiser le problème sans le nier, au lendemain de l’annonce de l’imminent départ vers la France de quelque 1.200 médecins algériens. Est-ce dans la logique des choses qu’en 20 ans, l’Algérie ait déjà abandonné 20.000 médecins, dont la quasi-majorité travaille actuellement en France ? Le ministre aurait dû soulever les causes poussant les médecins algériens à l’exil. Il y a certes les conditions de travail et le salaire, mais ce n’est pas tout. Les causes sont plus profondes et nécessitent un traitement lourd. Dernière question au ministre : pourquoi l’offre de soins s’est-elle appauvrie en Algérie ? À titre d’exemple, dans les années 1980, les greffes de reins étaient réalisées en Algérie sans problèmes majeurs. Des centaines d’opérations avaient été effectuées avec succès par les professeurs exerçant à la clinique de Daksi à Constantine. Ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Mais pourquoi donc cette régression ?

Mohamed Mebarki

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