Le docteur en psychologie Ramadne Aibeche tire la sonnette d’alarme. Il affirme que le phénomène de la toxicomanie à Mila ne cesse de prendre de l’ampleur, en gagnant des couches sociales jusque-là insoupçonnées. Le psychologue, qui est le premier responsable des cellules d’écoute à la Direction de la Jeunesse et des Sports (DJS), a chapeauté la réalisation d’une étude sur le phénomène de la toxicomanie localement. Et les résultats obtenus sont alarmants, pour le moins que l’on puisse dire.
Le docteur Ramadane Aibeche a indiqué, dernièrement, à L’Est Républicain, que l’étude académique en question est la quatrième à être réalisée sur le déplorable phénomène par les cellules d’écoute de la DJS. Il affirme : « La situation va de mal en pis ». La quatrième étude du genre, réalisée entre janvier et août de 2023, a touché 1.500 personnes de la tranche d’âge allant de 10 à 35 ans. Cette population est constituée de 32 % de filles et 68 % de garçons. « L’étude est actualisée tous les quatre ans. Comparativement aux résultats obtenus lors de celles précédentes, cette quatrième étude a mis en relief une évolution inquiétante du phénomène de la toxicomanie», soutient le responsable des cellules d’écoute de la DJS. En effet, selon notre interlocuteur, la cocaïne se « démocratise » de plus en plus : les trois études réalisées précédemment sur le phénomène n’avait pas confirmé la consommation de la cocaïne par les personnes interrogées. « Or, ce qui est nouveau et grave à la fois, c’est que beaucoup de personnes touchées par la présente étude ont confirmé avoir consommé de la cocaïne, ne serait-ce qu’une infime quantité. Avant, les personnes sondées affirmaient soit n’avoir jamais vu de cocaïne, soit, dans le pire des cas, en avoir vu sans en consommer. Dans la dernière étude, au contraire, beaucoup de personnes interrogées ont avoué avoir « goutté » à cette poudre », dira notre interlocuteur. Cette évolution est considérée comme « un très mauvais signe » pour la santé mentale de la population. Notre interlocuteur précise, d’autre part, que même les régions reculées ne sont pas épargnées. « Des jeunes issus de mechtas reculées ont répondu par l’affirmative à la question relative à la consommation de cocaïne. Donc, il n’y pas que les milieux urbains qui sont concernés par la menace que représentent les drogues dures. Les jeunes, dans les douars, le sont autant également », affirme-t-il. L’étude a, d’autre part, apporté des indices importants sur la consommation de psychotropes dans les milieux juvéniles. Selon notre interlocuteur, 15 % des personnes interrogées reconnaissent avoir consommé du Lyrica. Le docteur Aibeche souligne, par ailleurs, que les individus concernés par cette étude sont « conscients » du danger que représentent ces produits sur leur santé physique et mentale et ont exprimé leur disponibilité à suivre des traitements ou des cures pour s’en défaire. « Les concernés croient que le traitement médical, la prière et le soutien de la famille peuvent les aider à sortir de la situation qui est la leur, en se disant prêts à suivre des traitements pour se défaire de leur addiction aux drogues », explique-t-il. Aibeche a évoqué, par ailleurs, le travail de sensibilisation aux dangers des drogues effectué par les cellules d’écoute de la DJS dans les établissements publics. « Le travail de sensibilisation ne s’arrête pas à longueur d’année. En 2023, on a touché 40.000 jeunes dans 43 établissements de jeunesse, 32 Collèges d’Enseignement Moyen (CEM), huit Centres de Formation Professionnelle et d’Apprentissage (CFPA), trois maisons d’arrêt et l’université », détaille Aibeche. Notre interlocuteur appelle, d’autre part, à une plus grande coordination entre psychologues, services de sécurité, assistance sociale, éducateurs, mosquées et cellule familiale pour une meilleure prise en charge de la population concernée.
Kamel B.
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