Pour la première fois depuis plus de six ans, les autorités et la centrale syndicale ont pu célébrer la Journée internationale des travailleurs. Un souvenir des luttes des Algériens pour arracher plus de droits sociaux, mais aussi des jours sombres de l’utilisation de cet anniversaire, comme d’autres occasions d’ailleurs, comme un tremplin pour soutenir le pouvoir de l’époque. Depuis l’indépendance du pays en 1962, la célébration de la journée du 1er mai, dédiée aux travailleurs dans le monde, a toujours été l’occasion de se rappeler les sacrifices des anciens, ceux qui ont créé l’Union Générale des Travailleurs Algériens (UGTA), un certain 24 février 1956. Tous rappellent, à longueur de communiqués et de discours, le martyr d’Aïssat Idir, mort sous la torture de la soldatesque coloniale et des dizaines d’autres cadres et militants syndicaux. On se rappelle également que les travailleurs algériens ont « relevé le défi » à l’indépendance et ont réussi à construire le pays, malgré le manque d’instruction et surtout de moyens nécessaires. C’était aussi l’occasion, pour beaucoup d’acteurs et plus particulièrement des syndicalistes, de se rappeler au bon souvenir des gouvernants, réitérant leurs revendications visant à améliorer leurs conditions de vie. L’augmentation des salaires est souvent la première revendication portée à cette occasion. Mais lors des dernières années du règne d’Abdelaziz Bouteflika, la célébration de la Journée internationale des travailleurs, comme celle de la nationalisation des hydrocarbures et de la création de l’UGTA, a été transformée en grand-messe des oligarques, qui avaient pris en otage l’État et ses institutions et avaient les manettes. Profitant de l’absence du chef de l’État, malade, ils ont utilisé ces occasions pour asseoir leur pouvoir, asphyxiant les couches travailleuses de la société. Le chef de l’UGTA de l’époque, zélé dans son soutien aux oligarques, était devenu un de leurs porte-paroles. Au lieu de défendre les travailleurs, il défendait les patrons. Mais c’était dans l’ordre des choses à l’époque : ce groupe d’hommes d’affaires — qui sont tous en prison actuellement — avait toutes les organisations de la société civile, dont l’UGTA (dont l’ancien secrétaire général est actuellement derrière les barreaux pour des affaires de corruption) sous leurs bottes et les maniaient à leur guise. Mais le Hirak de février 2019 a mis fin à tout cela. Sous l’effet des répliques des manifestations de 2019, puis des trois années de pandémie et de paralysie associative qu’a connu le pays, la célébration de la Journée internationale des travailleurs a été quelque peu oubliée. En dehors de quelques rencontres de certains syndicalistes, l’évènement se limite à des annonces d’augmentations — dérisoires d’ailleurs — des pensions de retraite. Une routine brisée cette année,
Akli Ouali
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