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Préservation de la richesse phœnicicole à Biskra : Il y a Deglet Nour… et le reste du monde

En prévision des grandes chaleurs estivales, lesquelles sont favorables à la plantation de nouveaux palmiers-dattiers (Djebbar), la direction de l’Agriculture et du Développement rural et la chambre de l’agriculture locales mènent conjointement des campagnes d’informations afin que les phoeniciculteurs pensent à planter des variétés de dattes en voie d’extinction, a-t-on appris. Il s’agit pour eux de promouvoir la règle des 10 % de cultivars autres que la Deglet Nour par palmeraie, préconisée par les spécialistes et les experts soucieux de la préservation des multiples variétés de dattes que recèle le sud algérien. Il est vrai que dans un passé récent, on pouvait trouver une multitude de variétés sur les étals de souk Lahchich ou sur ceux du marché central de Biskra. Les clients trouvaient non seulement Deglet Nour, prisée de tous, mais aussi El Ghers, Mechdegla, Degla Baydha, Itima, Bouzerrou, Ghazi, Kseba, Halwa, Tantboucht, Arechti, Safraya, Balbali, Thouri, Dogmessi, Zorgaï, Khadhraï et d’autres variétés encore plus succulentes les unes que les autres. Malheureusement, beaucoup de ces dattes ont disparu des étals, constate-t-on. « Ce sont là un éventail de variétés de dattes qui dénotent de la richesse phoenicicole nationale, parmi les plus importants au monde. De concert avec l’administration des services agricoles et des planteurs de palmiers, nous agissons pour le préserver de la disparition, le développer et en tirer des plus-values conséquentes », a précisé Messaoud Guemmari, de la coopérative interprofessionnelle des phoeniciculteurs et des travailleurs de la terre de Biskra. Celui-ci soutient que la généralisation de la Deglet Nour au détriment des autres espèces de dattes participe à l’appauvrissement graduel d’une richesse inestimable.

Une multitude de produits dérivés

Doit-on rappeler que chacune de ces baies, en fonction de ses propriétés et de ses caractéristiques, peut être directement consommée ou bien transformée en farine, jus, miel, sucre, pâtes, vinaigre, alcool chirurgical ou éthanol. Des rebuts et des noyaux de dattes, on fabrique des pastilles de charbon et des aliments pour le bétail. Les potentialités offertes par les dattes et leurs produits dérivés sont immenses. Acteur principal de la réussite de cette opération consistant à dissuader les fellahs de s’investir dans la monoculture dédiée à la seule Deglet Nour, l’Institut Technique de Développement de l’Agriculture Saharienne (ITDAS) dont la direction est située à Ain Bennaoui, à sept kilomètres de Biskra, est chargée de convaincre et d’encourager les agriculteurs à développer toutes les variétés de dattes sans exception. Ce centre de recherche et d’application ayant des antennes à El Oued, Ouargla, Bechar et Adrar s’affirme comme l’instrument essentiel devant endiguer la perte de plusieurs variétés de dattes. « La Deglet Nour est la plus demandée sur le marché local et au niveau mondial. Cependant, chaque producteur de dattes est tenu de planter au moins 10 % de palmier-dattiers produisant des variétés de dattes en danger d’extinction. Dans le souci de favoriser la préservation de la biodiversité de la région et le caractère variétal des dattes, notre institut qui n’encourage pas les producteurs à s’investir dans la monoculture, désastre aux incommensurables conséquences, s’est doté, après une opération de caractérisation morphologique des différentes fruits, d’une appréciable collection de 80 variétés de dattes dûment répertoriées et exploitables. Nous les mettons à la disposition de tous les producteurs qui souhaitent diversifier leurs palmeraies », a souligné le chef du service des cultures pérennes de l’ITDAS.

Des dattes rustiques en voie de disparition

Il faut savoir que le palmier-dattier est une monocotylédone et ses régimes, notamment ceux de Deglet Nour sont la cible privilégiée des parasites et des maladies. De plus, cette variété, délicate et fragile, est complètement tributaire des soins prodigués par les fellahs et du climat dont les moindres modifications intempestives ont immédiatement des répercussions sur sa qualité. Par rapport aux autres variétés plus rustiques et résistantes aux aléas climatiques, Deglet Nour a des coûts d’entretien et de conditionnement exorbitants. A Biskra, on dénombre plus de 300 cultivars dont chacune des baies à sa couleur, sa forme, son volume et ses caractéristiques. Depuis des années, les pouvoirs publics et les départements agricoles, les fellahs et les exportateurs, les commerçants et les consommateurs focalisent leur attention et leurs efforts sur Deglet Nour. Les choses sont en train de changer, semble-t-il. « Certes, cette variété de dattes dont l’excellence n’est plus à prouver mérite tous les égards mais quand une catastrophe climatiques survient, elle est la première à être gâtée. A l’inverse, d’autres variétés font montre de bien plus de résistance. Mais celles-ci ont disparu lentement des palmeraies, des étals et même de la mémoire de certains cultivateurs. Il ne reste plus qu’El Guers et les dattes blanches qui résistent à la dictature de Deglet Nour. Pour alimenter les unités de transformation en différents produits dérivés, il est absolument nécessaire d’augmenter les superficies consacrées à, au moins, vingt variétés sur les 300 connues à Biskra », a suggéré la gérante d’une unité, implantée à Leghrouss, de production de farine (Rouina), de suc (Rob) et d’une pâte à farce pâtissière issus des dattes.

H. Moussaoui

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