Un nouveau sinistre est venu secouer avant-hier, dimanche 7 juillet, la wilaya d’Annaba. Deux candidats à l’émigration clandestine sont décédés et deux autres ont été brulés, avant d’être sauvés in extrémis et évacués au centre des grands brulés de la ville dans un état de santé critique, outre huit autres individus portés disparus, suite au naufrage de leurs deux embarcations, à quelques milles marins au large du cap de garde. Selon des informations recueillies auprès de marins-pêcheurs en activité au port de pêche (la grenouillère), il s’agit de deux groupes de harraga, qui naviguaient à bord d’un hors-bord et d’une embarcation de fortune. Ces harraga, principalement des enfants de deux quartiers de la commune d’El Bouni, à savoir Boussedra et Bouzâaroura, tentaient de rejoindre l’autre rive de la méditerranée, plus précisément la Sardaigne, en Italie. Ils ont levé l’ancre à partir de la plage de Djenane El Bey (Seraïdi), tôt dans la matinée d’avant-hier dimanche. Toujours selon la même source, ce drame est survenu après que le hors-bord a pris feu. Certains avancent un court-circuit dans le moteur, dont le feu s’est propagé aux jerricans pleins de carburants, quand d’autres parlent d’une bagarre qui aurait dégénéré. L’un des passagers aurait arrosé la barque d’essence avant d’y mettre le feu. Une chose est certaine, c’est le feu qui a causé la panique générale, obligeant les occupants à se jeter à l’eau et de joindre l’autre embarcation, laquelle n’a pas résisté à la surcharge et a coulé à son tour. L’intervention des garde-côtes et des éléments de la Protection civile s’est soldée par le sauvetage de deux victimes brulées et a permis de repêcher deux cadavres. Cette tragédie, qui a jeté l’émoi au sein de la population locale, pourrait avoir des dimensions beaucoup plus grandes, avec d’autres corps qui pourraient émerger, s’inquiète-t-on. À Annaba, où la nouvelle s’est répandue comme une trainée de poudre jusque dans les quartiers les plus reculés, l’inquiétude est grande chez les parents de harraga, notamment ceux qui ont été récemment signalés. L’alerte a été d’ores et déjà donnée et des opérations de recherches ont été lancées par les garde-côtes, mais aussi par des volontaires, ayant ciblé les côtes des wilayas de Skikda, Annaba et El Tarf. En outre, nous avons appris qu’une opération « SAR » a été déclenchée en pleine mer, pour la circonstance, par le commandement de la façade maritime est, relevant de la cinquième région militaire, à la recherche des portés disparus. Cependant et au moment où nous mettions sous presse, des bruits de couloirs faisaient état de deux autres cadavres qui auraient été repêchés, dans le même périmètre que celui du drame. La côte est de l’Algérie, principalement la partie relevant de la wilaya d’Annaba, est devenue cette dernière décennie un cimetière de la méditerranée, au même titre que les côtes tunisiennes et libyennes. Le phénomène des harraga qui tentent la mort à partir des côtes Annabies, longues de 80 kilomètres, remonte à la fin de l’année 2007, plus précisément depuis la nuit du 31 décembre, ou pas moins de 150 harraga à bord d’une trentaine d’embarcations de fortune avaient emprunté le chemin de l’exil volontaire, guidés par un ex-marin-pêcheur qui a découvert une semaine plus tôt cette nouvelle route maritime de la mort, reliant Annaba à l’île de Sardaigne. Des filières spécialisées dans le passage des clandestins ont depuis vu le jour, activant aussi bien dans la fabrication d’embarcations que dans la vente de matériels nécessaires à la navigation dans cette région. Depuis, il ne se passe pas une semaine sans que l’on signale le départ d’un ou plusieurs esquifs depuis les plages d’échouage de Sidi Salem, de Chetaibi ou encore du Cap de garde, dès que les conditions climatiques le permettent. Le danger de mort qui guette les harraga et le nombre terrifiant de décès et de portés disparus signalé par la presse ne parviennent toutefois pas à décourager les candidats, toujours plus nombreux à tenter leur chance.
B. Salah-Eddine
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