Véritable havre de paix, la localité de Z’Gaâ, construite sur le flanc d’une montagne qui se jette, d’une part, dans la grande bleue et ses deux merveilles : l’île Saint-Piastre et la fantastique la baie ouest du village touristique de Chetaibi, qui n’est plus à présenter, et qui est dominée, d’autre part, par les gigantesques chênes des monts de l’Edough et de Filfila. Un véritable tableau de maître. Le site est fascinant, tout simplement. Un merveilleux patchwork architectural épousant les traits de la nature et mariant la montagne à la mer. Cependant, il est navrant de découvrir que plus d’un demi-siècle après l’indépendance, ce paradis terrestre à vocation touristique par excellence, situé à environ dix kilomètres sur les hauteurs du golfe de Chetaibi, soit, le moins que l’on puisse dire, une zone d’ombre enclavée, où près de 700 habitants sont totalement livrés à eux-mêmes. Région féerique pour le visiteur, qui est vite repéré, mais région esseulée, oubliée et déshéritée pour ses habitants, qui subissent au quotidien une misère noire. Aujourd’hui, la population locale de Z’Gaâ réclame un tant soit peu d’attention, de la part autorités de la wilaya, pour faire sortir leur village du néant et de l’anonymat. « On aimerait voir le wali, dont on ne dit de lui que du bien, venir s’enquérir de visu des problèmes de tous les jours, dont souffre la population. » Tel est l’avis de tous les habitants de cette localité approchés par L’Est Républicain. Le chômage se pose avec acuité depuis la nuit des temps. Ce fléau demeure l’une des plaies de la région, qui semble être incurable, et qui pèse lourdement sur la jeunesse locale. Cette dernière n’a, en réalité, de rêve que pour le « bled » (la ville), autrement dit Annaba, ou du moins Berrahal, ou encore pour la Harga. Cet état de fait concerne la majorité des jeunes montagnards, parmi lesquels l’on dénombre des diplômés de différents paliers éducatifs, pour qui l’exode représente la seule issue. Z’Gaâ est fuie par les siens, qui vont chercher ailleurs le moyen de bâtir une vie meilleure. D’abord par les aînés, qui ont déjà montré le chemin et tant pis s’ils ont opté pour le béton, les « HLM » et la pollution industrielle des grandes agglomérations. Ensuite par ses jeunes lycéens et universitaires, qui quittent leur localité pour aller étudier notamment à Berrahal, Annaba et Skikda et dont beaucoup ne voudront plus jamais revenir. La population locale a beaucoup à dire sur les difficultés quotidiennes. Au problème du chômage s’ajoutent ceux de l’approvisionnement en gaz, de l’Alimentation en Eau Potable (AEP) et du logement. Sur ce dernier point, les habitants figurent parmi les moins bien lotis du territoire national. Depuis 1962, année de l’indépendance de l’Algérie, aucun immeuble n’a été réalisé sur ce site. Seul un projet d’une dizaine de logements ruraux a été lancé en 2005. De mémoire de riverains, uniquement quatre projets ont été réalisés sur les lieux depuis l’indépendance. Il s’agit d’une salle de soins, livrée et mise en service en 2004, une école primaire, un château d’eau à sec, surtout durant la période des grandes chaleurs et une antenne de l’Assemblée Populaire Communale, en 2019. Pour se déplacer vers Chetaibi, les habitants n’ont pratiquement à leur disposition qu’une unique navette. Un bus « scolaire », qui passe le matin pour ne revenir que dans l’après-midi. Comme il n’a jamais été question de compter sur les fruits de la terre, Z’Gaâ étant une région montagneuse, où l’on constate seulement quelques parcelles insignifiantes (sous-exploitées au demeurant), contre des milliers d’hectares de chênes-lièges et de maquis, le travail de la terre est difficile dans cette région et un autre travail est pratiquement impossible à trouver sur les lieux. Censé être destiné aux populations rurales et aussi paradoxal que cela puisse paraître, le programme national de développement rural n’a jamais touché la population de Z’Gaâ. Pour les habitants, la réalisation d’un tel programme, même a minima, qui vise rappelle-t-on plusieurs objectifs, notamment l’amélioration des conditions de vie des populations rurales, grâce à la création de diverses activités agricoles allant de l’arboriculture à l’apiculture, en passant par la construction de poulaillers et l’élevage de bétail, aurait certainement permis à la fois, la fixation des habitants dans leur localité, outre une vie meilleure.
B. S.-E.
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