Les Algériens ont pris tardivement conscience des avantages que la Tunisie pourrait leur offrir, mais quand ils ont commencé à le faire, ils ont tout simplement bouleversé certaines donnes et renversé les tendances, autrefois dominées par les pays occidentaux et leur savoir-faire voyagiste sophistiqué. Pays touristique de premier plan, ayant des traditions bien implantées dans ce domaine, la Tunisie attire aujourd’hui un nombre impressionnant de touristes algériens. Pour plusieurs raisons, liées à des facteurs culturels et civilisationnels partagés, la Tunisie est devenue avec le temps une destination privilégiée et très prisée pour beaucoup d’Algériens. Depuis le début de l’actuelle saison estivale, les postes frontaliers des deux pays ne cessent d’enregistrer une nette hausse dans le nombre d’entrées de touristes algériens. Sollicité par la radio tunisienne Mosaïque FM, le responsable du poste frontalier de Bouchebka, Houssem Hamzaoui, a annoncé avant-hier lundi des chiffres qui ne laissent aucun doute sur l’engouement des Algériens pour un pays voisin très engagé dans la fidélisation d’un « marché », qui « rapporte gros ». Selon lui, 28.300 Algériens sont entrés en Tunisie via ce poste en juillet 2024. Pendant la même période, « 24.400 Algériens sont retournés en Algérie par le même poste », selon le même responsable, qui a également signalé l’entrée de 5.440 voitures étrangères en Tunisie en juillet. Pour rappel, en 2023, la Tunisie a connu une croissance touristique impressionnante, avec une augmentation de 49.3 % par rapport à l’année précédente. Cette tendance à la hausse avait déjà commencé en 2022, lorsque la Tunisie avait accueilli 68 % du nombre de touristes de 2019. Statistiquement, ce sont les Algériens qui occupent la première place, avec un « impressionnant » total de 2.7 millions de visiteurs. En deuxième position, on trouve les Libyens, avec un total de 2.1 millions de personnes. Les Français arrivent en troisième position, avec 974.000 touristes ayant visité la Tunisie au cours de la même année. Certes, la proximité géographique entre les deux pays y est pour beaucoup, mais il existe aussi d’autres facteurs pour maintenir des chiffres aussi élevés. De l’avis de nombreux spécialistes, « le touriste algérien est très estimé en Tunisie, à cause de son attitude dépensière, contrairement aux autres visiteurs, notamment européens. Le partage de la même langue, l’histoire et les traditions entre Algériens et Tunisiens représente un facteur essentiel dans le choix de la Tunisie, qui présente aussi un produit touristique diversifié qui répond aux attentes ». Si la Tunisie est devenue « la destination préférée des Algériens », ce n’est certainement pas le fait du hasard. C’est le résultat d’un travail d’approche de longue haleine, accompli des deux côtés des frontières. L’ouverture des frontières terrestres et aériennes entre les deux pays est un élément essentiel, mais il faudrait tout de même que les Tunisiens fassent un gros effort pour améliorer certaines prestations de services, qui laissent par moments à désirer dans certains hôtels, tout autant que l’accueil par des réceptionnistes et autres employés, qui préfèrent faire les yeux doux aux étrangers des autres pays. Ce sont bien les Algériens, qui ont sauvé le tourisme dans ce pays. Lâché et boudé par les Occidentaux après les attentats terroristes de 2015, le secteur du tourisme, qui représente environ 7 % du PIB, est stratégique et a connu une baisse du nombre de touristes de plus de 30 % sur un an. Les pertes ont été estimées à des centaines de milliers d’euros en 2016. L’attaque terroriste du 18 mars 2015 ciblant le Musée du Bardo et l’attentat de Sousse survenu le 26 juin 2015, qui a fait 39 morts et 39 blessés, ont provoqué un vrai désastre et il a fallu un véritable élan de solidarité des Algériens pour permettre au secteur du tourisme tunisien de se relever.
Mohamed Mebarki
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