L’acheminement des drogues dures, principalement la cocaïne, vers les régions septentrionales du pays semble avoir changé d’itinéraire, face au forcing des services internationaux de lutte contre ce phénomène. La dernière saisie par le Service Central de Lutte contre le Trafic Illicite des Stupéfiants (SCLTIS) a permis de récupérer plus de 82 kilogrammes de cocaïne, pour une valeur totale estimée à plus de 180 milliards de centimes. Ce lot a été intercepté en provenance du Sud du pays. L’opération a permis de démanteler un important réseau criminel, composé de sept personnes, dont deux narcotrafiquants, une femme et son frère, originaires d’Annaba et résidant au pôle urbain de Kalitoussa, dans la commune de Berrahal, rappelle-t-on. Aujourd’hui, les enquêteurs parlent d’un immense trafic d’héroïne et de cocaïne en direction de l’Europe, via des voies maritimes, en partance des côtes des wilayas d’Annaba, de Skikda et d’El Tarf, ainsi que depuis des couloirs menant des régions subsahariennes vers des villes du Sud du pays, notamment Béchar et Tamanrasset, qui seraient devenues des fiefs du narcoterrorisme. « Les filières versées dans le trafic des stupéfiants ont bel et bien changé de stratégie en abandonnant aussi bien la voie maritime que les anciens couloirs de l’acheminement de la drogue par voie terrestre. La cocaïne est acheminée vers le pays en passant par le Mali et le Niger, par le biais des subsahariens, des harraga du désert transformés en mules*, et le kif traité à partir des frontières ouest, en provenance principalement du Maroc, un des plus grands pourvoyeurs à l’échelle mondiale », estiment les enquêteurs. Mieux encore, l’on révèle qu’en raison des équipements de détection dont disposent les ports des villes européennes, il a été établi que le littoral extrême est devenu une plaque tournante du trafic mondial de cocaïne. Les bateaux étant fouillés de fond en comble, la manœuvre du cheminement de la cocaïne a ainsi changé. D’ailleurs, les saisies opérées ne seraient, aux yeux des enquêteurs, que la partie émergée de l’iceberg. En pleine expansion, l’immigration clandestine est venue « au secours » des narcotrafiquants. Ces derniers, en ramenant leur marchandise d’Amérique latine, transitent par les côtes d’Annaba et d’El Tarf, avant de l’acheminer en même temps que les candidats à la Harga. Même chose depuis la Tunisie, exactement depuis la ville de Kélibia, estiment des experts. Très proche de la Sicile, Kélibia est connue pour être le lieu de prédilection des harraga. Dans ce contexte, on signale la mainmise de la mafia italienne sur le réseau qui va de l’Algérie vers l’Europe.
Passeur de harraga et de drogues dures
Depuis des années déjà, des groupes d’Algériens sont devenus des « passeurs » spécial Harraga du désert, un nouveau créneau qui attire de plus en plus les gens du grand Sud, seuls initiés d’ailleurs aux longs labyrinthes sinuant à travers les dunes et les immensités désertiques. Selon des Gendarmes Gardes-Frontières (GGF), ce nouveau créneau est détenu par une organisation tentaculaire qui régit tout le circuit d’immigration clandestine, de narcotrafic et de produits de contrebande venus du bout du monde. L’activité de « passeur », cache donc des secrets insoupçonnables, allant du trafic de stupéfiants à la traite d’êtres humains, des circuits de prostitution aux différents trafics d’armes, cigarettes, véhicules de marques, bétail et carburant. Plusieurs mules, « chargées » par de nombreuses filières internationales, notamment du Cameroun, du Mali, du Niger, de la Sierra Leone, ainsi que des franco-algériens, ont été arrêtées avec l’équivalent de plusieurs milliers d’euros de cocaïne et d’héroïne dans les ventres, à l’image des membres du réseau interpellé il y a quelques années dans la wilaya de Ghardaïa par la Gendarmerie nationale. Pour rappel, un total de 149 capsules, contenant près de 2.800 grammes de cocaïne, 1.116 grammes d’héroïne et 300 euros en espèces, ont été également découvertes à l’époque. Toujours selon la même source, ce coup de filet est intervenu à la suite d’un accident de la circulation sur la route nationale 1, reliant El Menia à Ghardaïa. C’est lors du déplacement des gendarmes à l’hôpital pour la vérification de l’identité des blessés que le pot aux roses a été découvert.
*Narcoterroriste qui ingère les capsules de drogues au péril de sa vie. Une technique bien connue de nos services et décelable par une simple radiographie abdominale.
Salah-Eddine
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