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Moudjahid de la première heure à Sétif : Kaddour Laadjal nous quitte à la veille de Novembre

Le jeudi 31 octobre, aux alentours de 21 heures, la fatidique nouvelle tombe : Sétif vient de perdre l’un de ses plus dignes fils. Kaddour Belkhir, surnommé « Kaddour Laadjal », ancien joueur du Stade Africain Sétifien (SAS) et figure emblématique du Fidai à Sétif, s’éteint à quelques heures du 70ème anniversaire du déclenchement de la glorieuse Révolution de Novembre 1954. La triste nouvelle, diffusée tel un coup de tonnerre, ébranle Sétif. Kamel Soualili, fils du défunt Mahmoud Soualili, ancien secrétaire général du SAS, exprime sa peine : « Je suis profondément attristé. Un nationaliste et révolutionnaire de la première heure s’en va. Fils digne de Sétif et du Stade Africain, il est parti sans prévenir, comme une bougie qui s’éteint à la veille du 1er Novembre, date qu’il portait dans son cœur et dans sa mémoire. Mon père perd un ami, un frère d’armes. Que Dieu Tout-Puissant l’accueille dans son vaste Paradis ». Ému, Fares Ziad, fils d’Abderrahmane Ziad, dit « El-Herra », un ami de longue date du défunt, reste sans voix : « L’un des derniers Mohicans de Sétif n’est plus. Il tire sa révérence à quelques heures de la commémoration d’une des plus belles pages de l’histoire de l’Algérie. Aami Kaddour Laadjal a servi corps et âme la cause nationale. Sétif perd ainsi une autre mémoire du patriotisme ». Acteur et témoin de premier plan de la lutte pour l’Indépendance, Kaddour incarnait la sincérité, l’engagement et l’amour de la patrie. Malgré le poids des années et une santé déclinante, cet ancien du SAS n’avait rien oublié. Son militantisme, forgé au sein du Stade Africain Sétifien, un terreau de chouhada, restait intact. Il symbolisait la mémoire vivante de la lutte pour les jeunes générations. Kaddour Laadjal, faut-il le rappeler, a marqué son époque par son engagement sans faille aux côtés de ses frères d’arme, dont nombre d’entre eux ont fait le sacrifice ultime. Jovial et humble, l’enfant du SAS n’aimait pas la lumière des projecteurs et ne se confiait pas facilement. Il avait pourtant récemment accepté de témoigner, livrant des souvenirs précieux sur le Fidai à Sétif, qui a tant sacrifié durant la Guerre de libération.

« L’Indépendance n’est pas tombée du ciel »

En effet, la ville martyre du 8 mai 1945, marquée par plus de 292 attentats et ayant donné plus de 500 martyrs, a été un vivier de résistants. Comme il le racontait : « Après la tentative d’extermination de 1945, un groupe de militants du PPA (Parti du Peuple Algérien), marqué par le traumatisme du ‘mardi noir’, créa le 20 septembre 1947 le Stade Africain Sétifien. Le football servait de couverture aux activités de l’Organisation Secrète (OS). Le SAS a été une école authentique de nationalisme et de patriotisme. La nuit, nous distribuions des tracts et collions des affiches anti-coloniales. Le SAS a donné 47 martyrs dont Mohamed Souakir, les frères Abid et Azzouz Berchi, Mohamed Guessab, Laid Cherraga, Saad Daghiche, Mohamed Kerouani, Tayeb Chellal et bien d’autres. Le titre de ‘bataillon des martyrs’ n’est pas usurpé ». Kaddour Laadjal se remémorait aussi son rôle dans une cellule de liaison et de renseignement : « Je travaillais avec Tayeb Ballout, Abderrahmane El Herra, Mohamed Bendjeddou, Tahar Abaoub, Mohamed Boudoukha dit Kabaina – chahid tombé au champ d’honneur. Nos responsables politiques étaient Hamlaoui Chougui et Belgacem Smati. Suite à l‘arrestation de Saad El Cor, qui a été torturé à mort, notre cellule est démasquée. Ses membres sont arrêtés et dirigés vers la ferme Salamo où nous avions subi les pires sévices. A notre libération, fin 1959, on reprend la lutte ». Ce combattant, profondément marqué par la perte de son frère, tombé au champ d’honneur à 16 ans, affirmait avec émotion : « Staifia lahrar khadmou ethouara (les Sétifiens, hommes libres, ont servi la Révolution). On peut parler des heures et des heures des sacrifices d’ouled Langar, Bel Air, Rivali. En réponse aux instructions du ‘nadam’, les meilleurs enfants de la ville ont rejoint la capitale où leurs noms sont gravés en lettres d’or. Né en 1944, mon frère qui avait donné du fil à retordre à l’autorité coloniale a été exécuté du côté d’Oued Chair où il est toujours enterré sous un arbre. Mon défunt père ne voulait pas le déplacer. Nos enfants d’aujourd’hui et de demain doivent savoir que l’Indépendance de l’Algérie n’est pas tombée du ciel. Ce n’est pas un don de De Gaulle. Nous avons payé une forte, une très très forte, dime pour arracher notre liberté. Cette liberté a été irriguée du sang de plus d’un million de martyrs. Il ne faut jamais l’oublier », soulignait Kaddour Laadjal ayant rejoint hier, vendredi 1er novembre 2024, tout un symbole, sa dernière demeure à Sid El Kheir où il a été accompagné par une foule nombreuse ayant tenu à lui rendre hommage, à saluer le combat de toute une génération de jeunes gens ayant tout sacrifié pour que l’Algérie vive libre et indépendante. Que le brave repose en paix.

Kamel Beniaiche

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