Malgré les efforts des autorités, les exportations hors-hydrocarbures ne décollent pas. C’est pour cela que le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, se consacre lui-même au dossier. Il a réuni, lui-même dimanche dernier, les grands exportateurs et les responsables concernés par l’exportation dans le but de relever le niveau des exportations. « Cette réunion a été fructueuse car elle a permis de sortir avec une feuille de route tracée par le président de la République, laquelle sera suivie par le conseil », a déclaré Kamel Moula, président de Conseil du renouveau économique algérien (CREA) à la presse au siège de la Présidence de la République à l’issue de la réunion. Le président de la République a été ferme lors de cette réunion, en donnant des instructions visant à accompagner les opérateurs économiques sur le terrain et à lever toutes les contraintes et entraves, notamment celles liées à l’exportation, a ajouté le président du CREA. Pour sa part, le ministre du Commerce extérieur et de la Promotion des exportations, M. Mohamed Boukhari, a indiqué que « cette importante réunion a permis de prendre connaissance des projets des opérateurs économiques et d’écouter leurs préoccupations liées à l’exportation”. Lors de cette réunion, le président de la République a donné « des instructions fermes pour la prise en charge rapide, minutieuse et efficace de toutes les préoccupations et pour l’élaboration d’une nouvelle vision stratégique visant à ériger notre pays en un pôle d’excellence en matière d’exportation », a ajouté le ministre, soulignant l’engagement de son département à prendre les mesures nécessaires pour atteindre cet objectif suprême. Pour tenir ainsi une deuxième réunion en l’espace d’un mois, le chef de l’Etat a dû constater une évidence : non seulement les montants des exportations en dehors du pétrole et du gaz n’augmentent pas, mais ils diminuent au fil des années. Après un pic de 6,8 milliards en 2022, ces exportations sont descendues à moins de 5 milliards en 2023 (alors que le président avait fixé le seuil de 13 milliards de dollars) et les prévisions de la Banque d’Algérie prédisent des montants d’un maximum de 4 milliards de dollars pour l’année en cours. C’est très dérisoire surtout si on s’inscrit dans les ambitions du chef de l’Etat qui souhaite arriver à 15 milliards de dollars d’exportations en 2027 et 30 milliards en 2029. Pour expliquer cette situation, des experts avancent plusieurs raisons. A commencer par la nature des entreprises algériennes. En majorité des Petites et Moyennes entreprises (PME), les entreprises algériennes sont souvent d’ordre familial, fait observer Brahim Gundouzi, professeur d’économie à l’Université de Tizi-Ouzou. Gérées de « manière artisanale », ces entreprises se caractérisent par une « absence de politique de marketing » et sont « loin des développements technologiques », observe pour sa part, le chercheur en économie Farid Kourtel. Puis, s’ajoute l’incapacité de la majorité de ces sociétés à « produire suffisamment en qualité suffisante », précise Brahim Guendouzi. A cela s’ajoute un autre problème de taille : les entreprises algériennes ne savent pas promouvoir leurs produits. A titre d’exemple, les opérateurs algériens n’ont participé, durant l’année en cours, qu’à six foires économiques sur le continent africain, l’un de leurs principaux marchés cibles. « Les entreprises étrangères ne connaissent pas les opérateurs algériens à cause d’une absence de participation » de ces derniers à des foires et salons internationaux, fait observer Farid Kourtel qui conclut donc que « les produits algériens ne sont pas connus à l’étranger ». A cela s’ajoute le problème du système bancaire. Pour Brahim Guendouzi, l’anachronisme du système bancaire algérien, très en retard par rapport aux développements que connaît le monde dans ce domaine, est une des raisons qui empêchent les entreprises algériennes de se projeter à l’étranger. Farid Kourtel donne un exemple précis de ces blocages qu’impose le système bancaire. Des entreprises algériennes ont trouvé des partenaires en Libye, prêts à acheter du produit algérien. Mais les banques algériennes ont « refusé d’accepter du cash » qu’emploient essentiellement les opérateurs libyens. « Cela a fait perdre au pays des sommes importantes », observe l’universitaire. Pour rehausser les volumes et les montants des exportations, les autorités misent surtout sur l’exploitation des sites miniers de Gara Djebilet (fer), de Oued-Amizour (Zinc et aluminium) et Tébessa (Phosphate). A quoi s’ajouteront probablement les produits agricoles et industriels. Mais cela risque de prendre le temps de remettre à niveau les entreprises.
Akli Ouali
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