Les avocats alertent : la plateforme numérique mise en place par la Cour suprême pour le traitement des pourvois en cassation consacre, selon eux, un « véritable déni de justice » et constitue une « atteinte aux droits des justiciables ». Mis en place depuis plusieurs mois, ce système conduit, selon eux, à des rejets massifs des requêtes des justiciables, qui s’estiment lésés par les verdicts rendus en première et en deuxième instance. Le premier donneur d’alerte est l’ancien président de l’Union Nationale des Ordres des Avocats (UNOA), Me Ahmed Saï. Dans un texte diffusé sur les réseaux sociaux et partagé largement par des avocats, il précise que la « Cour suprême a mis en place récemment une plateforme, dans le cadre de ce qui est appelé numérisation du secteur de la justice, qui rejette les pourvois en cassation en la forme ». Dans 57 cas, les requêtes sont rejetées, dit-il. « C’est la machine qui tranche la question des recours. C’est ce que l’on appelle déshumaniser la justice », regrette-t-il, précisant que les conséquences de cette démarche sont irrattrapables. Selon lui, un oubli de citer la profession ou l’adresse du justiciable qui introduit un pourvoi en cassation « conduit automatiquement au rejet de la requête, et par conséquent, à la perte “des droits des justiciables”, qui n’auront plus de possibilité de taper à une autre juridiction pour obtenir gain de cause ». « La démarche de la Cour suprême et l’ensemble des instances judiciaires, qui cherchent seulement l’erreur ou une lacune pour rejeter les plaintes au lieu de les traiter, n’est pas raisonnable et engendre de graves dépassements », déplore-t-il, appelant le ministre de la Justice à intervenir pour retirer le Code de procédures pénales pour enrichissement, avec la participation des avocats. Pour sa part, le président de l’UNOA, Brahim Taïri, affirme que cette plateforme « tue la justice ». « Ce qui est dénoncé par Me Saï est vrai. Les juges doivent faire un effort pour consacrer la justice. Ce n’est pas le cas avec ce procédé adopté pour le traitement des recours », explique-t-il, estimant que 60 % des pourvois en cassation sont rejetés en la forme. « Nous avons demandé une réunion avec le président de la Cour suprême, pour examiner cette situation et nous attendons sa réponse », indique-t-il. De nombreux avocats ont commenté aussi le texte d’Ahmed Saï, et dénoncent ce qu’ils appellent « la robotisation de la justice ».
Samir Rabah
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