Entre 2009 et 2023, l’Algérie a importé pour plus de 20 milliards de dollars de poudre de lait et de lait infantile. Durant la même période, l’État a dépensé « près de 800 milliards de DA en soutien financier direct » de ce produit, soit en tout près de 26 milliards de dollars au taux de change actuel. C’est ce qu’a révélé un rapport publié récemment par la Cour des comptes. Ces dépenses considérables ont-elles permis une disponibilité régulière de ce produit de large consommation et d’assurer au pays les conditions objectives pour une autosuffisance durable ? Selon cette institution chargée du contrôle des finances de l’État, les résultats sont loin de répondre aux attentes. Si l’on évacue la contribution des réseaux informels, tout en prenant en considération les nombreux intrants importés, l’Algérie demeure dépendante du marché international pour ce qui est de la matière première à hauteur de 85 %, a relevé la Cour des comptes. Cette dernière note d’ailleurs la difficulté « d’articuler la stratégie de développement de la filière bovine avec la filière lait ». Le même rapport a noté que le soutien financier accordé par l’État à la filière (prêts bonifiés, fiscalité avantageuse, soutien aux intrants, à l’insémination artificielle, aux cultures fourragères, au matériel, primes financières et soutien à la consommation) n’a pas profité aux éleveurs du secteur informel, qui représentent la majorité des producteurs de lait en Algérie. Cependant, grâce à la prime accordée pour chaque litre de lait produit, qui est passée à 19 DA contre 11 DA en 2009, la collecte a été multipliée par 4 entre 2009 et 2013. D’après le rapport, qui a rappelé que le montant des primes n’a pas évolué de 2014 à 2023, le dysfonctionnement réside dans le prix de rémunération du litre à la production, qui est resté inférieur à celui du fourrage en vert. Le rapport relève également de nombreuses irrégularités concernant le paiement des primes et l’identification du cheptel, tout en critiquant le système de suivi et d’évaluation de l’administration en charge, qui est « réduit à des situations chiffrées, élaborées au besoin et souvent à la demande (en fin d’année, NDLR). Les informations y afférentes manquent de fiabilité et ne résistent pas aux contrôles de cohérence et/ou de vraisemblance ». En outre, le rapport a suggéré l’intégration du lait cru dans la production « du lait pasteurisé conditionné règlementé », déplaçant le « soutien à la consommation de la poudre de lait importée vers le soutien à la consommation de lait cru local », sachant que le soutien financier à la consommation du lait importé était de 45 DA/litre en 2023, alors que celui de la production du lait local était situé entre 19 et 25 DA/litre. Enfin, pour atteindre une autosuffisance de 80 %, le rapport mentionne la nécessité d’arriver à « un surplus de production laitière de 2 milliards de litres de lait par an ».
Mohamed M
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