Lioua est un des villages les plus anciens de la zone phoenicicole des Ziban-ouest. Il est situé à 45 kilomètres au sud-ouest de Biskra en bordure de l’Oued Jdai. Commune relevant de la daïra d’Ourlel, s’étendant sur un territoire de 243,20 kilomètres carrés dont 80 % sont arables, on y dénombre plus de 35.000 habitants vivant du travail de la terre, de la fonction publique, de métiers artisanaux et du commerce. D’ailleurs, Lioua est célèbre pour sa vocation agropastorale et on y trouve la plus succulente des viandes ovines et caprines ainsi que des dattes et des fruits et légumes d’une qualité exceptionnelle. Outre les nombreuses boucheries, on y trouve aussi l’une des plus grandes casses d’automobiles et d’engins de travaux publics, tenue par des ferrailleurs expérimentés, a-t-on relevé. Au même titre que les autres communes de la wilaya, elle a bénéficié de projets sectoriels dans les domaines de l’énergie électrique, de l’hydraulique, des travaux publics et de l’agriculture, entre autres, inscrits au Plan Communal de Développement (PCD) et au Fonds Commun des Collectivités Locales (FCCL) pour désenclaver ses localités de Sehira, Leksour, Oued Rmay, Laghmig et Mermouza. Pourtant, cette commune ancestrale présente la physionomie d’une ville abandonnée et ayant été exclue des plans d’aménagements urbains. Y arrivant par une journée glaciale de cet hiver 2025, vous aurez l’impression de faire un voyage dans le passé. La rue principale est dans un état déplorable. Sans la présence de palmiers à la houppe caractéristique apparaissant çà et là, on se croirait dans un western spaghetti. Les ruelles sont ensablées et bordées de stipes de palmiers et d’anciens jardins à l’agonie. Les maisons font triste mine. Étrangement, elles portent toutes la mention « A vendre ». De vieilles guimbardes occupent les abords. Il y a des kiosques avec de ternes enseignes indiquant « Flexy », seul indice de modernité, des cafés et quelques commerces de denrées alimentaires et une multitude de boucheries et de mécanique-auto. A Lioua, le temps semble avoir suspendu son inexorable avancée dans les années 1980, a-t-on la sensation. Des hommes emmitouflés dans des « kachabia » déambulent comme autant de spectres surgissant de nulle part. Ils sont avenants et communicatifs et se laissent facilement aller à des confidences sur leur vie dans ce village.
Des apparences trompeuses
« Ne demandez pas ce qu’il y a à Lioua. Demandez plutôt ce qu’il n’y a pas. Nous vous dirons tout, il n’y a rien et il n’y a tout. Pourtant, c’est un village riche de son passé et de ses sites archéologiques remontant à l’époque romaine et bien avant. Il a besoin d’un plan d’aménagement urbain comme celui entamé à Tolga. De plus, le canal de drainage des eaux pluviales et d’irrigation le traversant et qui s’est transformé en cloaque infesté d’eaux usées doit être assaini car il s’en dégage des odeurs pestilentielles et cela atteint à l’environnement et à la santé des habitants. Puis, on se demande pourquoi le projet de la zone d’activité pour lequel une assiette foncière de plusieurs hectares a été concédée en 2015 est gelé. Enfin, il y a des locaux d’anciennes sociétés nationales disparues qui se délabrent alors que nous avons besoin d’un centre culturel, d’une nouvelle poste et de sièges pour les associations et les équipes sportives. Le seul secteur qui brille par ses réussites est celui de l’éducation nationale. Il y a des écoles primaires, des collèges et un lycée tandis qu’un autre est en voie de construction à Lioua. Néanmoins, cela reste un triste village que ces jeunes rêvent de quitter pour les lumières de la ville », expliquent-ils en substance. « Ne vous fiez pas aux apparences. Lioua n’aime pas afficher son opulence et ses richesses. Elle préfère la discrétion. Si les maisons sont toutes à vendre, c’est pour éloigner le mauvais œil. Les façades sont expressément laissées sans crépissage ni peinture par peur de l’ostentatoire et des ouï-dire mais à l’intérieur, ce sont des logis confortables, voire des palais cossus assurant le confort de tous. Ceux que vous voyez au volant de vieilles voitures, en ont souvent une autre rutilante et de dernier cri, qu’ils sortent pour aller se pavaner à Biskra et à Ouled Djellel. C’est une population de roublards, de superstitieux et de geignards impénitents. C’est vrai, nous avons besoin de postes de travail pour les jeunes, mais attachés qu’ils sont à leur terroir et à leurs familles, ceux-ci ne la quitteront jamais », a lancé un jeune pendulant entre plaisanterie et expression de vérités. En tout cas, les habitants de Lioua espèrent seulement que leur village ancestral pourra, au vu de ses potentialités humaines et de ses ressources agricoles et naturelles, se hisser au rang des localités des Ziban-ouest « où la notion de développement socioéconomique n’est pas une simple expression vaseuse et creuse de sens », ont souligné nos sympathiques interlocuteurs.
Hafedh M.
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