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La marine nationale traque, 24 heures sur 24, des trafiquants de tous bords au large des côtes annabies, d’une longueur de 80 kilomètres, qui sont de plus en plus l’objet de toutes les convoitises des filières mafieuses. Aux « vagues » de candidats à l’immigration clandestine s’ajoutent les passeurs, principalement des marins pêcheurs qui se sont convertis par nécessité en bateliers. Ces derniers assurent des expéditions clandestines, notamment sur la route Annaba – Île de Sardaigne (Italie). Le trafic des stupéfiants et le braconnage du corail viennent compléter ces activités illégales. Des centaines d’aventuriers, parmi lesquels on dénombre également des femmes et des enfants, ont été arraisonnés et reconduits à bon port. Plusieurs autres ont néanmoins réussi à rejoindre l’autre rive de la Méditerranée. Le corail algérien est commercialisé à prix d’or dans les circuits d’un pays voisin. Quant au trafic des stupéfiants, malgré les innombrables opérations de saisies effectuées à tous les niveaux par la marine nationale, la gendarmerie et la police, la ville des rives de la Seybouse semble être totalement submergée par les stupéfiants. La saisie récente dans une plage d’échouage de Chetaïbi d’un hors-bord doté d’un puissant moteur à propulsion, lors d’une tentative avortée d’immigration clandestine, a mis au grand jour l’utilisation massive des bateaux rapides dans ce trafic. Ces opérations partent du littoral d’Annaba, ville tristement surnommée « le port international des harraga ». Selon des marins pêcheurs, des bateaux hautement sophistiqués sont aujourd’hui au service aussi bien des réseaux de harraga que des pilleurs de corail. Ces nouveaux « businessmen » ont pour mission d’assurer des navettes Annaba – Île de Sardaigne, de gérer le trafic des stupéfiants et d’assister les braconniers des récifs coralliens. Ces derniers sont facilement exploitables à l’aide de balises électroniques. Pas plus tard que l’été dernier, plusieurs bateaux de ce type, qui étaient amarrés à la plage de la « Caroube », ont été volés par des passeurs et des harraga. Certains ont coulé au large des côtes d’Annaba. Concernant le trafic de drogue, ces dernières années, plusieurs sacs remplis de stupéfiants, attachés à des flotteurs pour filets de pêche, ont été signalés aux services de sécurité par des marins pêcheurs. À la Marsa (Skikda), située à la limite de la wilaya d’Annaba, des fûts ont été rejetés sur le littoral de cette commune. Il s’agissait de contenants cylindriques en acier, généralement destinés au transport de marchandises en vrac. La quantité de stupéfiants découverte dans ces fûts « largués » sur les côtes de la Marsa reste inconnue. Au-delà du phénomène des harraga qui prend de l’ampleur dès que les conditions de navigation sont favorables, c’est surtout la fabrication des embarcations de fortune qui inquiète le plus. En effet, nous assistons dans cette wilaya à une escalade dans l’évolution de la clandestinité. Si un citoyen vient à construire illicitement une baraque pour s’abriter, la raison peut trouver matière à justifier un tel geste. Cependant, cette logique est totalement différente lorsqu’il s’agit de la confection clandestine d’embarcations destinées aux harraga. Des ateliers s’affairent depuis un certain temps à la fabrication d’un nouveau type d’embarcation « spécial harraga ». Ces embarcations à fond plat dépassent parfois les quinze mètres de longueur, contrairement aux modèles habituels de dix mètres dont la charge est limitée à une vingtaine de harraga. Le matériau utilisé pour ce genre de « réalisation » est d’origine douteuse et issu du trafic. Le bois est récupéré des chantiers de travaux publics : les madriers et troncs d’eucalyptus servant de poutres ou de soutien sont détournés de leur destination d’origine. Ils servent à la conception de ces embarcations de fortune, conçues pour entasser une trentaine de candidats à l’émigration clandestine. Pour beaucoup de professionnels de la mer, les matériaux utilisés sont à la fois illégaux et impropres à leur exploitation comme éléments de base pour la fabrication de ces « machines de mort », appelées à affronter les éléments naturels et une mer agitée.
B. Salah-Eddine
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