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Manœuvres militaires franco-marocaines  : L’Algérie dénonce une provocation

En ce moment, les relations algéro-françaises vont de mal en pis, la moindre éclaircie étant vite effacée par de nouveaux nuages, indiquant que la vigilance est plus que jamais de rigueur. Un nouvel épisode, et non des moindres, s’ajoute à l’escalade entre les deux pays, avec la convocation, hier vendredi, de l’ambassadeur français à Alger, Stéphane Romatet, par le secrétaire général du ministère des Affaires étrangères algérien, Lounès Magramane. Au cœur de cette convocation : le projet de manœuvres militaires franco-marocaines, prévues en septembre prochain, non loin de la frontière algérienne. Une véritable provocation sur laquelle l’Algérie, forte de son bon droit, ne pouvait rester silencieuse, dès lors qu’elle représente une menace potentielle pour la sécurité du pays, dans un contexte géopolitique sous haute tension. On ne peut pas dire que l’ambassadeur de France s’est fait « sonner les cloches », car l’Algérie est respectueuse des usages diplomatiques, mais le message est clair et ferme, comme l’explique le communiqué du ministère des Affaires étrangères : « Cette audience a eu pour objectif d’appeler l’attention du diplomate français sur la gravité du projet de manœuvres militaires franco-marocaines, “CHERGUI 2025′, dont le nom est très évocateur, prévues en septembre prochain à Er-Rachidia, non loin de la frontière algérienne », indique le communiqué. Le diplomate algérien a précisé à son interlocuteur que ce projet d’exercice militaire « est appréhendé par la partie algérienne comme un acte de provocation à l’égard de l’Algérie » et qu’il ne manquerait pas, par ailleurs, d’aggraver « la crise qui caractérise à présent les relations algéro-françaises et de les porter à un seuil supérieur de gravité ». L’ambassadeur français est chargé d’obtenir « les clarifications nécessaires sur ce sujet », tout en « transmettant à sa hiérarchie la position de l’Algérie telle qu’exprimée », conclut le communiqué. La convocation de l’ambassadeur de France à Alger intervient dans un contexte de raidissement sans précédent des relations entre Alger et Paris, qui sont au bord de la rupture. Sous la pression de l’extrême droite, qui a fait de la question migratoire un enjeu de campagne électorale, le Premier ministre, François Bayrou, avait convoqué, mercredi passé, un comité interministériel de « contrôle de l’émigration », visant à reprendre le contrôle des flux migratoires et à définir les orientations en la matière. Ce comité, consacré en réalité à l’Algérie, devenue un sujet de politique intérieure française, s’est soldé par une prise de parole lunaire d’un François Bayrou à l’air emprunté, adressant un ultimatum à l’Algérie. On ne fait pas usage d’intimidation et encore moins d’ultimatums envers la patrie de Larbi Ben M’Hidi et Abane Ramdane, chose que semble avoir oubliée Bayrou, otage de son ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, victime d’obsessions anti-algériennes. C’est dans cet esprit qu’a été rédigée la réplique du ministère des Affaires étrangères, qui a brandi la menace d’une « rupture », si la France venait à dénoncer unilatéralement les accords de mai 1968, faisant ainsi porter à la partie française la responsabilité d’une telle rupture. En visite au Portugal, le président Emmanuel Macron a fait une bonne lecture de la réaction algérienne, rédigée dans un style où la fermeté du ton n’excluait pas la mesure dans la forme. Cela l’a conduit à désavouer publiquement ses Premier ministre et ministre de l’Intérieur, se réappropriant par-là même ses prérogatives de premier responsable de la diplomatie française. Tout en s’engageant à ne pas dénoncer unilatéralement les accords de mai 1968 – désavouant ainsi son Premier ministre – car c’est, selon lui, « un acte qui n’a pas de sens », Emmanuel Macron a appelé l’Algérie à « réengager un travail de fond » avec la France sur les accords d’immigration. « Nous n’avancerons pas s’il n’y a pas un travail, on ne peut pas se parler par voie de presse, c’est ridicule, ça ne marche jamais comme cela », avait-il clamé, s’adressant ainsi à son Premier ministre et à son ministre de l’Intérieur, désireux d’en découdre avec l’Algérie. Question : Après cette mise en garde de l’Algérie, qui n’acceptera pas de provocation à sa frontière, le président Macron renoncera-t-il à ces manœuvres, au propre comme au figuré ?

H. Khellifi

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