
Reprise du dialogue stratégique, coopération sécuritaire et émigration. Après plusieurs mois de crise sans précédent entre l’Algérie et la France, les deux Présidents, Abdelmadjid Tebboune et Emmanuel Macron, ont remis les pendules à l’heure. Un long appel téléphonique, échangé lundi à l’occasion de l’Aïd el Fitr, a non seulement mis fin à la crise diplomatique, mais a également tracé les grandes lignes du futur des relations.
Fin de la crise et relance de la coopération…
Au cours d’un « échange franc et amical », les deux présidents de la République ont en effet décidé de relancer le dialogue bilatéral, entamé lors de la déclaration d’Alger, signée en août 2022. « Les deux présidents sont convenus que la force des liens – en particulier humains – unissant la France et l’Algérie, les intérêts stratégiques et de sécurité respectifs des deux pays, les défis et crises auxquels l’Europe, la Méditerranée et l’Afrique étaient confrontées exigeaient le retour à ce dialogue d’égal à égal, entre deux partenaires qui constituent des acteurs européen et africain de premier plan » ; précise le communiqué des deux présidences. Concrètement, les deux pays ont décidé de relancer leur coopération sur la mémoire et la sécurité, un domaine dans lequel les deux pays avaient une relation particulière. Sur le mouvement des groupes terroristes au Sahel, le retour des djihadistes de Syrie, ou sur d’autres dossiers sensibles, les services de sécurité de l’Algérie et de la France ont eu des échanges très utiles et surtout bénéfiques pour la sécurité des deux États. Mais cela s’est brusquement arrêté ces derniers mois. Une situation qui a été préjudiciable pour tous. Sur la mémoire, les deux présidents ont décidé de relancer les travaux de la commission mixte d’historiens algériens et français. Elle se réunira prochainement à Paris et devra présenter ses conclusions avant l’été 2025, précise le document. Présidée par Benjamin Stora côté français et Mohamed-Lahcen Zeghidi côté algérien, la commission a arrêté de travailler aussitôt la crise entre les deux États ayant débuté, soit en juillet 2024. Auparavant, elle avait abattu un important travail, notamment sur des questions d’archives et de restes mortuaires d’anciens combattants algériens. La France a notamment reconnu sa responsabilité dans l’assassinat de l’avocat Ali Boumendjel et du dirigeant du FLN, Larbi Ben M’Hidi. Le travail devra continuer pour permettre, en principe, au Président Macron de reconnaître, une bonne fois pour toutes, les crimes coloniaux perpétrés par son pays.
Échange de visites…
Comme première concrétisation de cette reprise des relations bilatérales, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, effectuera une visite de travail à Alger le 6 avril prochain, pour discuter avec son homologue algérien, Ahmed Attaf, des sujets importants que sont l’émigration et la mémoire. Après cela, la voie sera ouverte à Gérald Darmanin, ministre français de la Justice, pour venir à Alger. Si la date de cette visite n’est pas encore fixée, les sujets judiciaires ne manquent pas. Alger réclame en effet certaines personnalités de l’ancien régime, à l’image de l’ancien ministre de l’Industrie, Abdesselam Bouchouareb, que la France ne veut pas extrader pour « raisons de santé et d’âge ». Alger réclame également des figures du MAK et d’autres activistes hostiles aux autorités et qui bénéficient du droit d’asile en France. Les deux présidents ont également décidé d’ouvrir le sulfureux dossier de la migration, plus particulièrement le dossier d’Algériens que la France souhaite expulser et qui a souvent constitué une pomme de discorde entre les deux États. Visiblement, le sujet va être relancé et l’Algérie se montre ouverte à la discussion. En outre, Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune ont discuté de la relance de la coopération économique, ce qui permettra aux investissements français bloqués jusque-là de reprendre en Algérie. Cet échange téléphonique va certainement être suivi par d’autres actes concrets, à commencer par la nomination rapide d’un nouvel ambassadeur algérien à Paris.
Akli Ouali
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