
Les relations entre l’Algérie et la France connaissent une nouvelle crise. À la mise en détention d’un diplomate algérien travaillant au consulat général de Créteil, l’Algérie a répliqué, expulsant dans la soirée de dimanche à lundi douze diplomates français travaillant à l’ambassade de France, à Alger. Une décision qui verra certainement une réplique des autorités françaises. Jamais depuis l’indépendance de l’Algérie en 1962 les relations avec la France n’ont connu une escalade aussi grave : douze diplomates travaillant dans l’ambassade de France à Alger ont été priés par les autorités algériennes de quitter le pays sous 48 heures. Les conventions internationales permettent plus que cela : les autorités algériennes ne sont même pas obligées de motiver leur décision, qui entre dans le domaine de sa souveraineté. Rendue publique au milieu de la nuit, l’information a fait réagir le gouvernement français, son chef de la diplomatie, Jean-Noël Barrot, en tête. Celui-ci a indiqué que son pays allait répliquer si l’Algérie ne revenait pas sur sa décision : c’est l’usage diplomatique qui veut que la réplique à l’expulsion de diplomates soit automatique, avec le même nombre et au grade équivalent. « L’Algérie expulse douze agents de notre ambassade. Nous devons pratiquer l’exacte réciprocité. C’est le B-A-BA des relations internationales : toujours rendre la gifle reçue. Pas un de plus, pas un de moins. De même grade, de fonctions comparables », écrit l’ancien diplomate français, Gérard Araud. Selon des sources concordantes, les douze agents qui quitteront l’Algérie dans les jours à venir relèvent du ministère français de l’Intérieur et sont employés dans l’ambassade à Alger soit comme gendarmes (ce corps dépend, en France, du ministère de l’Intérieur), soit de quelques autres fonctionnaires. C’est la preuve que dans sa réplique, l’Algérie cible directement le ministre français de l’Intérieur, Bruno Retailleau. Au-delà de cet évènement, ce qui se passe actuellement est la preuve que les relations algéro-françaises ne tiennent qu’à un fil : un mot de plus, une phrase sortie du contexte, ou parfois une allusion trop appuyée peut mettre le feu aux poudres. Lorsque cela vient d’une partie que l’Algérie juge proche de l’extrême droite, cela a une signification particulière. Derrière cette affaire « se cache en réalité une guerre intestine au sommet de l’État français », écrit dans ce sens l’éditorialiste algérien Tewfiq Meraou. « D’un côté, le Président Emmanuel Macron, qui tente difficilement de maintenir un dialogue fragile avec Alger (…) De l’autre côté, se trouve une droite sécuritaire et néo-souverainiste, influente jusque dans les arcanes de certains ministères, qui observe avec méfiance toute tentative de rapprochement avec Alger, qu’elle interprète comme une compromission », ajoute-t-il. Au milieu de cette lutte d’intérêts politiques et de positionnements, les relations entre les deux pays sont prises en otage, mettant des millions d’Algériens, de Franco-Algériens ou de Français ayant des liens avec l’Algérie, dans une position inconfortable, et rien ne dit que la crise s’arrêtera demain.
Akli Ouali
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