
Lancée avant-hier, vendredi 16 mai, la campagne nationale de nettoyage des cimetières, à laquelle ont participé de nombreux membres de la société civile, a révélé des découvertes pour le moins troublantes. À Annaba, dans ces lieux supposés être dédiés au repos éternel, un grand nombre d’objets ont été retrouvés enterrés près des tombes : cadenas, talismans, « hdjeb » ou « kteb », clous, effets vestimentaires, photographies, voire même des morceaux de linceuls. Ces objets sont souvent associés à des pratiques de sorcellerie, destinées à nuire à une personne ciblée. Selon les croyances populaires, les victimes de ces sorts peuvent être condamnées à souffrir toute leur vie, sombrer dans la maladie mentale, errer sans but, échouer à se marier, divorcer ou vivre en reclus, jusqu’à ce que l’objet soit découvert et que l’intervention d’un exorciste – un véritable « mouraki » – permette de briser l’envoûtement. Les auteurs de ces actes n’hésitent pas à venir enterrer ces objets en pleine nuit, parfois contre plusieurs centaines de milliers de dinars. Les tombes oubliées sont souvent choisies délibérément, car elles sont peu visitées. Le sort peut ainsi agir en toute discrétion, sans que personne ne vienne déranger le subterfuge. D’après des témoignages, dans certaines morgues, des pratiques abjectes consisteraient à récupérer l’eau ayant servi à la toilette mortuaire ainsi que la savonnette utilisée pour purifier le corps, puis à les revendre à des prix dépassant l’entendement. Une chaîne de télévision privée aurait auparavant mis au jour ce trafic sordide. Dans d’autres cas, des complices glisseraient la photo de la personne visée dans la bouche du défunt, refermée ensuite sans que la famille ne s’en aperçoive. Ces pratiques occultes choquent et interpellent. Mais suite aux actions de nettoyage, ces objets malfaisants ont été extraits des cimetières, et certains pensent que des personnes jusque-là ensorcelées pourraient enfin être libérées de leur tourment. Des exorcistes reconnus tenteront sans doute d’annuler les effets néfastes de ces objets en récitant des versets du Coran. Parmi d’autres méthodes utilisées par ces « magiciens » : accrocher un talisman à une haute branche, isolée au cœur d’une forêt. Le moindre souffle de vent ferait trembler l’arbre, provoquant chez la personne visée des secousses internes et une grande détresse. Les exemples de sorcellerie sont innombrables, et les procédés employés dépassent parfois l’imagination. Face à cela, les citoyens sont appelés à faire preuve de vigilance, à dénoncer les auteurs de ces pratiques aux autorités compétentes, et à protéger les lieux sacrés de ces manipulations qui y sont perpétrées.
Ahmed Chabi
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