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Le président aux patrons des journaux :  « Je ne veux pas d’une presse flagorneuse »

La rencontre organisée par la présidence de la République avec des responsables de presse, dans le prolongement de la célébration de la Journée internationale de la liberté d’expression, outre qu’elle aura été l’occasion d’une franche mise à plat des problèmes du secteur, semble aussi marquer un changement de ton des pouvoirs publics dans le sens de l’apaisement et de l’intercompréhension entre l’exécutif et ce qui est considéré comme le 4ème pouvoir. Nombre de patrons de presse qui se sont succédé  au micro, ont égrené la litanie des carences chroniques qui affectent le secteur, même si leurs propos, du moins pour certains, manquent de rigueur dans leur formulation, donnant du coup l’impression d’être là que pour demander encore et encore l’aide de l’Etat. Et le président Tebboune de rappeler à ce propos, chiffres à l’appui, que sans la publicité étatique et l’attitude conciliante des imprimeries publiques, de nombreux journaux, qui constellent actuellement le paysage, notamment la presse écrite, auraient tout simplement mis la clé sous la porte depuis belle lurette. Cependant et pour mettre la relative « bonne santé » du secteur Tebboune décline les chiffres pour souligner que le paysage médiatique algérien est pluriel, voir même en forme de mosaïque, avec 120 titres de la presse écrite, pas moins de 20 sites électroniques, une vingtaine de télévisons entre le public et le privé. Tout en mettant en relief cette pluralité vertueuse, le président Tebboune et en connaisseur des coulisses de la presse (il a été ministre de la Communication), déplore une certaine monotonie des contenus de la presse, qui font doublon, alors que dans le même temps, la presse privée, chargée des questions militaires, économiques, environnementales est quasiment absente, regrette-t-il.   Par rapport à toutes ces problématiques qui en disent long sur le marasme chronique de la presse algérienne, en dépit de son apparente pluralité, le président Tebboune réitère sa disponibilité à écouter les différents acteurs de la corporation.« Je suis prêt à vous suivre, organisez-vous, créez des syndicats forts qui seront les représentants de vos intérêts devant les pouvoirs publics », suggère le président de la République, qui réaffirme la volonté de l’Etat d’accompagner la presse réaffirmant sa conviction que « les pouvoirs publics ont besoin d’une presse forte et crédible pour être le fer de lance de l’Algérie. Surtout en cette conjoncture si particulière où elle est la cible des attaques récurrentes et ciblées pour attenter à sa sécurité et sa stabilité ». La liberté de la presse, un sujet polémique que le président n’a pas cherché à éluder, en soutenant de prime abord qu’il n’existe pas en Algérie de journalistes emprisonnés, pour délit d’opinion, contestant par ailleurs le classement annuel de l’Algérie, en matière de liberté d’expression par Reporters sans frontières.  « Je tiens à le répéter, en Algérie, il n’existe pas de journalistes détenus pour délit d’opinion, celui auquel vous faites allusion (ndlr Kadi Ihassane)  est incarcéré pour cause de financement étranger de son entreprise, ce que la loi algérienne interdit », dit-il à ce propos Le président Tebboune s’en est pris à Reporters sans frontières et d’autres ONG qui de son avis « ne sont pas une référence, elles sont aux ordres de ceux qui les ont créées, en revanche nous tenons compte des avis émis par les institutions de l’ONU ».  Mercredi , à l’occasion de la célébration de la journée internationale de la liberté d’expression et en présence du président Tebboune, le ministre de la communication Mohamed Bouslimani a fait le procès des ONG en les accusant de « mettre en avant l’alibi de la liberté d’expression pour faire pression sur certains Etats et remettre en cause leurs choix politiques souverains, alors que ces mêmes ONG ont fait profil bas  sur l’assassinat de la journaliste palestinienne Chirine Abou Akla. ». « Je ne souhaiterai plus que les délits commis par les journalistes, soient traités par la justice, je vous invite à créer des instances éthiques et professionnelles qui auront à connaitre de ces délits », insiste le président dont le propos laisse entendre un changement de paradigme dans le traitement des délits de presse et une fin souhaitable de leur judiciarisation  .Le président Tebboune a, en outre marqué sa défiance par rapport à la tonalité dithyrambique qui marque actuellement le presse algérienne, soucieuse d’être  dans les bonnes grâces du pouvoir, pour continuer à bénéficier du nerf de la guerre qu’est la manne publicitaire étatique. « La presse des applaudissements n’est pas utile, je n’en veux pas, il faut dénoncer les carences, les dysfonctionnements, mais dans un esprit patriotique, car l’Algérie, en dépit de nos différences, est notre maison commune à  tous. L’Algérie est grande, c’est nous qui sommes petits, nous devons nous élever à sa hauteur », a conclu le président Abdelmadjid  Tebboune sur le chapitre de la presse à l’occasion de cette « rencontre conviviale » dont le ton ouvre de nouvelles perspectives dans les rapports pouvoir/presse.       

H.Khellifi.

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