L’importation des véhicules neufs, censée répondre aux attentes de citoyens désireux d’acquérir une voiture, fait actuellement l’objet d’un détournement, en bonne et due forme, par des spéculateurs sans foi ni loi, qui replongent à nouveau le marché dans la tension, antérieure au retour de l’importation, décidée par le Gouvernement. Conséquences : il est aujourd’hui quasiment impossible pour un citoyen lambda d’acheter un véhicule chez un des concessionnaires agréés par l’Etat, à cause d’un stratagème machiavélique de ces « Smasra », qui s’accaparent le peu de voitures qui arrivent aux ports et qui, comme chacun le sait, sont loin d’être suffisantes, pour répondre aux besoins d’un marché qui a accumulé en terme d’approvisionnement un retard considérable. Afin d’endiguer cette spéculation, génératrice de frustration et de tension, le ministre de l’Intérieur, a émis une mesure, le 6 septembre, instruisant l’ensemble des walis de la faire appliquer par les présidents des Assemblées Populaires Communales (APC) « de toute urgence ». Que dit cette instruction ? « Lutter par des mesures drastiques contre la spéculation sur les véhicules neufs achetés auprès des concessionnaires ». Comment ? En impliquant les présidents d’APC. Ces derniers, sous le contrôle du chef de daïra, sont tenus de suspendre « immédiatement et à titre provisoire » le traitement des dossiers d’immatriculation des véhicules neufs achetés par procuration, par ces spéculateurs, qui les proposent à la vente sur des plateformes en ligne ou dans des show-rooms à des prix prohibitifs. Fini donc l’établissement et la légalisation des actes de vente et autres pièces d’état-civil, nécessaires pour la constitution du dossier de la carte grise, pièce nécessaire pour la mise en circulation du nouveau véhicule. La correspondance du ministre de l’Intérieur aux walis vient en appui à celle de son collègue de la Justice, qui en date du 2 août, avait adressé la Chambre nationale des notaires une instruction dans laquelle il leur est expressément demandé suspendre, à titre provisoire, l’établissement des procurations, autorisant les spéculateurs à agir au nom de leur mandant, c’est-à-dire les propriétaires fictifs du véhicule. En fait, le stratagème est simple : moyennant une somme, qui varie en fonction de la cylindrée, le spéculateur procède à l’achat massif des voitures au nom des amis ou des proches, qui leur délivrent la procuration permettant d’agir en leur nom. Avec cette procuration, établie par un notaire, le spéculateur à toute la latitude de revendre le véhicule à une tierce personne, qui accepte de rouler pendant cinq années avec cette procuration. Certes, la méthode n’est pas très commode, mais elle offre la possibilité d’acquérir, sans attendre, un véhicule neuf. Est-ce que la mesure du ministère de l’Intérieur, comme celle du ministre de la Justice seront-elles respectées ? Rien n’est moins sûr.
Une vraie solution contre cette spéculation qui court-circuite le marché, serait d’étoffer l’offre. Mais tant que celle-ci est faible, le retour à la stabilité semble peu probable.
H.Khellifi
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