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Gestion des deniers publics : Le rapport accablant de la Cour des Comptes

Dans son rapport de l’année 2023, la Cour des Comptes a mis en avant de graves dysfonctionnements dans la gestion de certains établissements et entreprises publics. C’est le cas du secteur du Tourisme, de l’Office National des Publications Scolaires (ONPS) et de la Banque de Développement Local (BDL). Ainsi, dans un long dossier consacré à la rénovation des structures hôtelières dépendantes du secteur public, le rapport de la Cour des comptes estime qu’à la « date du 30 novembre 2022, soit plus de 11 ans après son lancement, le plan de rénovation et modernisation (PRM) n’a pas été achevé et a connu un dépassement significatif de son coût prévisionnel, passant de 73,926 Mds de DA pour 63 unités à 126,12 Mds de DA pour uniquement 27 unités achevées et 14 en cours de réalisation ». Pis, la conduite des projets de modernisation « n’a pas permis l’atteinte des objectifs assignés au PRM. Bien plus, ces filiales ont cumulé un endettement insoutenable dont le montant consolidé des engagements, au 31 décembre 2021, a atteint 117,521 Mds de DA dont 73,447 Mds de DA ont été effectivement consommés. La quasi-totalité d’entre- elles ont enregistré des déficits d’année en année, accentués en 2020 du fait de la pandémie de la Covid-19 ». « Cette situation risque de remettre en cause la pérennité de l’exploitation de plusieurs filiales dont quatre sont déjà tombées, à compter du 31 décembre 2017, sous les dispositions de l’article 715 bis-20 du code de commerce », notent encore les juges de cette institution de contrôle. Dans le détail, le rapport porte sur la réhabilitation et la modernisation de 61 structures hôtelières et la création de deux nouvelles unités, à savoir : un centre de remise en forme sur le site de Thalassothérapie de Sidi Fredj et un autre sur le site du complexe touristique des Andalouses. Il explique que pour mener ces opérations, « la gestion, le suivi et la supervision n’ont pas été à la hauteur de l’importance du programme » et note un « recours excessif et injustifié aux avenants, dont certains ont été conclus hors délais contractuels ». Plus que cela, « sur les 63 unités hôtelières ciblées dans le PRM seules 34 d’entre-elles ont été achevées dont une unité nouvelle, à savoir Thalasso les Andalouses, soit 54% de l’objectif. De plus, sept (07) unités parmi les 34 déclarées achevées, n’ont été achevées que partiellement, ce qui ramène le taux réel de réalisation à 43% ». Pourtant, la baisse des capitaux propres au-dessous du quart du capital social « tombe sous les dispositions de l’article 715 bis 20 du code de commerce », qui stipule que « si du fait des pertes constatées dans les documents comptables, l’actif net de la société devient inférieur au quart, il faut convoquer l’assemblée générale extraordinaire à l’effet de décider s’il y a lieu d’engager la dissolution de la société ». L’autre établissement public ausculté par la Cour des Comptes est l’ONPS. Parmi les anomalies relevées figure le décalage entre le nombre de livres imprimés et ceux vendus. Pour la période 2015 à 2019, « la quantité de manuels imprimés apparaît en disproportion avec l’évolution du nombre des élèves scolarisés, destinataires desdits manuels. En effet, alors que nombre d’élèves affiche un taux d’évolution annuel relativement constant de 03%, la production de manuels a connu une évolution erratique avec des taux croissants de 18% et 27% de 2015 à 2017 pour diminuer de 3% et 11% en 2018 et 2019 », note le document. Durant la même période, « la production du manuel scolaire n’a pas évolué avec la même cadence que celle des ventes. Ainsi, le volume de la production s’est accru de près de 43% entre 2014 et 2019, contre une hausse de 11% pour celui des ventes » peut-on encore lire. Du côté des établissements bancaires, le rapport de la Cour des Comptes relève, à titre d’exemple, des montants faramineux que la Banque du développement local (BDL) ne pourra jamais récupérer. Ainsi, « en 2021, le volume des créances non performantes ou créances classées a atteint 364,29 Mds de DA, représentant 33,5% de l’encours total brut des crédits à la clientèle. Le recouvrement d’une partie des créances impayées, pour un montant de 18,16 Mds de DA, reste très modeste au regard notamment des impayés accumulés s’élevant à 248,42 Mds de DA, mais aussi du montant des provisions pour pertes sur créances de 112,91 Mds de DA, ce qui constitue une incidence négative pour la situation financière et les résultats d’exploitation de la banque ». Pire, « les impayés des entreprises privées (y compris de promotion immobilière) représentent à fin 2021, 44,55% du total des crédits de la banque, les encours de crédit correspondants constituent 61,73% du total des crédits de la banque », note la Cour des comptes. Le volumineux document de 432 pages s’est également intéressé à la gestion du transport scolaire dans certaines wilayas, celle de la construction d’une ceinture verte sur la route menant de Ouargla à Touggourt et d’autres encore. Il est à signaler que ce rapport sera remis au président de la République.

Akli Ouali

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