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Restitution des objets ayant appartenu à l’Émir Abdelkader : Une revendication légitime

« La très compliquée restitution des sabres de l’Émir Abdelkader, héros de la résistance à la conquête française de l’Algérie ». C’est le titre d’un article paru hier mercredi, sur le site du journal Le Monde. La publication de cet écrit n’est pas le fruit d’un choix éditorial aléatoire, mais répond à une volonté politique, clairement affichée par l’État français au lendemain d’une date (8 mai 1945), célébrée en France et commémorée en Algérie. Une date qui n’a pas la même signification pour les deux pays et les deux peuples. S’agit-il d’une réaction officieuse au message adressé par Abdelmadjid Tebboune, à l’occasion du 79e anniversaire des massacres perpétrés par l’armée coloniale française à Sétif, Guelma, Kherrata et d’autres localités algériennes ? À première vue, et après une lecture au premier degré, on peut déduire de l’existence d’un fil conducteur entre la revendication des Algériens concernant la récupération des biens ayant appartenu à l’Émir Abdelkader, « séquestrés » dans des musées français, et la mise en exergue formulé par le journal d’un « imbroglio juridique », pouvant éventuellement entraver la demande algérienne. « La restitution de ses objets relève par ailleurs du casse-tête. Le sabre et le burnous réclamés par Alger appartiennent au musée français de l’armée, qui affirme être entré en leur possession de manière régulière : le premier aurait été remis par l’Émir en 1847 et le second offert par son fils », lit-on dans un autre article. Est-ce vraiment l’absence d’un texte de loi qui empêche les autorités françaises de répondre favorablement à la revendication portée par l’État algérien ? Ou est-ce une certaine volonté colonialiste visant à « garder la main » sur la « reddition » de l’Émir Abdelkader et la charge politique que recèlent les objets revendiqués ? En France, l’adoption d’un texte autorisant la restitution des biens ayant appartenu à l’Émir Abdelkader attend toujours. Dans une déclaration à la presse en novembre 2023, l’historien Benjamin Stora affirme qu’il a « toujours plaidé effectivement pour des gestes à caractère pratique, concret, symbolique ». « Évidemment, l’Émir Abdelkader est un personnage essentiel dans cette histoire et c’était une vieille revendication algérienne. Moi, je crois que c’est nécessaire d’accomplir ces gestes. On se heurte à une difficulté, c’est que par exemple, le burnous appartient à une famille privée, il n’appartient pas à l’État français. Donc, il va falloir effectivement voir avec la famille qui a acheté, je crois, cette pièce importante, de voir s’il était possible de reposséder à nouveau ces pièces et documents pour la restitution. C’est compliqué les histoires de restitution. Puis, il y a aussi la loi en France sur la restitution dont une partie a déjà été adoptée, je crois, par le Sénat. Cette loi doit continuer d’être discutée sur la restitution des œuvres culturelles, matérielles ou immatérielles. Donc normalement, il devrait y avoir dans le cadre de cette loi la restitution à l’Algérie d’un certain nombre d’objets, dont ceux-là, c’est-à-dire ayant appartenu à l’Émir Abdelkader », a estimé le co-président de la commission mixte, histoire et mémoire. Ceux qui à Paris parlent de chantage des autorités algériennes, liant la restitution des biens à la visite de Tebboune en France, ont sûrement d’autres motivations, pour rendre complexe un dossier qui dépend en grande partie de la volonté politique.

Mohamed Mebarki

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