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L’engrenage de la toxicomanie en débat à Biskra : Les futurs paramédicaux initiés aux bons gestes

LInstitut National de Formation Supérieure des Paramédicaux (INFSMP) de Biskra a organisé, jeudi 11 mai, une journée d’étude et de sensibilisation sur laddiction et la toxicomanie, destinée à ses pensionnaires et étudiants. L’événement a vu la participation dexperts, de professeurs à lUniversité Mohamed Khider (UMK), de psychologues, de cadres de la direction de la Santé et de membres dassociations œuvrant pour la protection des enfants et des jeunes contre ce fléau social et individuel de la consommation des drogues de toutes natures. « Face à la prégnance et la propagation de ce phénomène atteignant de plus en plus de personnes, notamment les enfants et les adolescents, cette journée d’étude et de sensibilisation inscrite dans le cadre de la formation des futurs personnels paramédicaux sest imposée delle même. Au cours de leur parcours professionnel, ces infirmiers et auxiliaires médicaux seront confrontés à des personnes vivant sous la dépendance dun produit ou d’une substance comme le tabac, l’alcool, les drogues, les médicaments, ou le jeu, l’informatique, ou même lutilisation des Smartphones. Ils auront la lourde tâche daccueillir, de côtoyer, de rassurer et de prendre en charge des personnes agissant sous linfluence de toute une gamme de produits et de substances quils doivent connaitre et en identifier les effets et les répercussions sur la santé mentale et physique. Lobjectif est de les doter des connaissances requises et nécessaires pour que leurs pratiques et interventions soient les plus efficaces possibles », a souligné Kamel Khaldi, membre du comité dorganisation de cette rencontre. Le docteur M. Aidoune, neuropsychiatre dans le secteur privé, sest attaché à expliquer les causes psychologiques et physiologiques de laddiction à des substances naturelles ou de synthèse issues de manipulations chimiques. Il a détaillé les origines et les effets de la nicotine, de la cocaïne, de lopium, du Khat, de lhéroïne, du cannabis, du LSD (diéthyllysergamide, ndlr), de lecstasy, des barbituriques, des amphétamines, des anxiolytiques et des psychotropes. Il a expliqué quils augmentent généralement la pression artérielle et provoquent un état de bien-être, d’euphorie et d’exaltation, accompagné d’une sensation de lucidité et d’excitation ou de sérénité accrues et factices. Cependant, a-t-il ajouté, leurs répercussions palpables à court ou moyen termes se caractérisent par la génération daccoutumances néfastes et pernicieuses mettant à mal lintégrité mentale et physique du sujet. « Celui-ci se retrouve de fait pris dans un engrenage duquel il est difficile de sextirper sans laide dune main extérieure et experte », a-t-il rappelé. Son confrère le docteur A. Henouda, médecin généraliste au Centre Intermédiaire des Soins en Addictologie (CISA) de Biskra, a présenté un exposé exhaustif à propos de laddiction chez la femme et en milieu scolaire. Imputant à la famille la responsabilité première de lexpansion de la consommation des produits stupéfiants par les pubères, la docteure Karima Boukhalfa-Mokrane, psychologue à lINFSPM de Biskra, a axé son intervention sur le rôle de la famille face à ce fléau.

Maladie ou délinquance ?

« Nous sommes en présence de profondes mutations socioéconomiques faisant que la famille élargie nexiste plus. Les grands-parents, les oncles, les tantes et les cousins ne jouent plus leurs fonctions d’éducateurs et daccompagnants des plus jeunes. Les parents sont souvent dépassés par la situation et leurs enfants ont dautres influences », a-t-elle affirmé. « La nature humaine est ainsi faite. Elle est toujours à la recherche dun confort psychologique, même éphémère et fatal. Pour estomper une douleur et fuir la réalité, le jeune prend un café, une cigarette, du cannabis, une gélule de psychotrope et il se retrouve dans de beaux draps. Cest le vide, loisiveté et la vacuité qui le poussent dans les bras de laddiction. Avec une formation, un travail, des activités sportives et de lespoir de vivre mieux, de concrétiser ses rêves et de saffirmer dans une liberté ressentie, il naura pas besoin de drogues », a ajouté Aicha Nahoui, professeure de psychologie à lUMK. La professeure en psychologie clinique Fatima Debarrassou a, quant à elle, détaillé les étapes et le processus par lesquels passe la personne pour se retrouver empêtrée et engluée dans laccoutumance à un produit. « 70 % des cas daddiction chez les jeunes sont dus à des problèmes relationnels, des déficits sentimentaux, des frustrations et des questionnements existentiels auxquels ils ne trouvent pas de réponses plus convaincantes que celles offertes par les paradis artificiels et le recours aux drogues. Nous sommes dans une société où la méta-communication fait des ravages. On ne peut sortir de ce tourbillon mortel qu’à la force de la volonté personnelle. Mais les drogués sont-ils des malades ou des délinquants ? Les mesures coercitives sont-elles idoines pour enrayer, voire éradiquer, ce phénomène de notre société ? », a-t-elle lancé vers lauditoire invité à approfondir la question. « Les personnes assujetties à un produit ou une drogue sont des malades en puissance atteints de troubles psychologiques et auxquels il faut offrir un traitement et des solutions alternatives. Dieu merci, les drogues dures sont inexistantes chez nous. La plupart de nos patients consomment de lalcool, des cigarettes, du cannabis ou des psychotropes comme la fameuse Lyrica. En dépit des tabous enveloppant ce sujet, nous recevons de 100 à 150 patients par mois voulant se débarrasser de leurs fâcheuses habitudes. Nous recevons des filles et des garçons, des adolescents, des universitaires et des femmes mariées se sachant en difficulté à cause de leurs addictions. Des thérapies sont envisageables pour chaque cas. Nous menons aussi des campagnes de sensibilisation aux dangers induits par les drogues dans les écoles, à luniversité et à travers les ondes de la radio des Ziban », a souligné Ikram Abderahmani, spécialisée en traitement de laddiction au CISA de Biskra. Tahar Chenna, le directeur de lINFSPM de la reine des Ziban, a fait lapologie de « l’éducation davant » mêlant châtiments corporels et contrôle et surveillance de tous. Il a prôné le retour vers « une éducation rigoriste et sévère pour les enfants » et un durcissement des peines pour les trafiquants de drogues afin de se défaire du fléau de laddiction et de la toxicomanie devant lequel les pouvoirs publics, la famille et l’école semblent démunis et impuissants « tant ce phénomène socio-psychologique lésant l’économie nationale prend une ampleur jamais égalée auparavant dans notre société », a-t-il conclu.                                                                                      

Hafedh Moussaoui

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