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Situation du patrimoine culturel à Sétif : Les vestiges à l’épreuve de la préservation   

La wilaya de Sétif dispose d’un patrimoine archéologique dont la diversité est dument établie. La région carrefour regorge de vestiges de civilisations anciennes (byzantine, romaine ou encore fatimide). Les nombreux sites et monuments archéologiques d’une valeur historique incommensurable font des hauts plateaux sétifiens une destination touristique de premier plan. Les innombrables vestiges de la région apportent un témoignage exceptionnel sur des civilisations disparues. Classés au patrimoine mondial, de très beaux ensembles de ruines renferment les ingrédients nécessaires à un statut universel exceptionnel. Cuicul, aujourd’hui Djemila, en est l’exemple concret. La ville romaine située à 30 kilomètres de Sétif, construite en 98, s’agrandit au troisième siècle sous le règne de l’Empereur Caracalla. Elle a été reconquise par les Byzantins. Au vu de l’état de conservation des ruines, la ville a été classée au patrimoine mondial de l’humanité en 1981. Préservé, le site accueille chaque année plus de 30.000 visiteurs, des étudiants et de nombreux diplomates étrangers en poste à Alger. Mieux, la région n’a pas usurpé son titre d’« autre berceau de l’humanité », où  les fouilles  des chercheurs algériens et étrangers réalisées sous la direction du professeur Mohamed Sahnouni, ont permis de découvrir à Ain Boucherit, sur le site de Ain Lahnech (daïra d’El Eulma), le second site le plus vieux au monde daté de 2,4 millions d’années après celui de Kouna, en Ethiopie, qui remonte à 2,6 millions d’années. Malheureusement, plusieurs sites, considérés par les spécialistes comme de véritables réserves de la mémoire historique collective des hautes plaines sétifiennes, tels que le tombeau de Scipion l’africain, Mons (Henchir-El-Ksar) et les anciens bains romains de hammam Guergour, sont dans une mauvaise posture. Soulignons que la législation en vigueur n’est pas toujours appliquée, preuve en est le cas du célèbre mausolée de Scipion l’Africain, encerclé de part et d’autres d’habitations d’une cité résidentielle située non loin du premier campus de l’Université Ferhat Abbas de Sétif (UFAS), alors que la loi exige la délimitation d’un champs de visibilité d’au moins 200 mètres autour de tout monument ou site à valeur historique. Pour rappel, le tombeau de Scipion l’africain, un vestige historique vieux de près de 2.000 ans, remonte à l’époque romaine. Il est daté de la fin du troisième ou début du quatrième siècle après J.-C. La situation du site de Mons, situé sur l’ancien itinéraire entre Sétif et Djemila, près de Beni-Fouda, n’est guère reluisante. Appelé aussi « Henchir-El-Ksar », la plus ancienne inscription latine datée trouvée dans le site est de l’an 157 après J-C, Mons devient une municipalité romaine. Les restes archéologiques dans ce site se limitent au tracé de la forteresse Byzantine, ruines visible d’un temple. Les archéologues soupçonnent l’existence d’une ville enfouie comme celle de Djemila (Cuicul). Situées à 55 kilomètres au nord de Sétif, les sources de Sidi-El-Djoudi émergeant sur la rive droite de l’oued Bousselam, dans la commune de Hammam Guergour, ont été exploitées pendant les époques Berbère, Romaine et Musulmane. Les études physico-chimiques faites à diverses reprises ont toutes conclu à la radioactivité des eaux thermales et minérales et certains les classaient parmi les trois plus riches connues dans le monde. Déclenchée dernièrement, l’opération de nettoyage des lieux ne devrait pas s’inscrire dans les actions conjoncturelles.

Opérations de grande envergure

Afin d’avoir d’amples informations sur les mesures de préservation et de protection de cet important héritage culturel, nous avons pris attache avec Ameur Hachemi, directeur de la Culture et des Arts de la wilaya. « A l’instar de Timgad, Tipaza et d’autres régions du pays, la wilaya de Sétif est une pépinière de vestiges de civilisations anciennes. Le titre de l’autre berceau de l’humanité confère aux hauts plateaux sétifiens une place de choix dans la sphère du patrimoine universel. La protection de tous les biens matériels (architecturaux et archéologiques) et immatériels (expressions orales, rites et traditions, arts, savoir-faire artisanal), légués par les anciennes civilisations qui se sont succédé de la préhistoire jusqu’à nos jours, est un devoir national. Ce volet est l’une des priorités de la tutelle et de la wilaya de Sétif où s’enchainent les actions d’évaluation et de préservation des sites historiques. Dans un premier temps, nous avons lancé des opérations de nettoyage. Réalisée en collaboration avec les autorités locales de la daïra de Hammam Guergour, des membres de la société civile, des jeunes universitaires et d’autres intervenants, le lifting des vieux bains romains de Guergour a été une réussite. Le soutien du wali accordant une grande importance à la préservation et à la valorisation du patrimoine nous encourage à aller de l’avant », souligne en préambule le spécialiste en art plastique. « Des opérations de grande envergure sont prévues au tombeau de Scipion l’africain et au site de Mons. Avant le lancement de la procédure de classement du mausolée de Scipion à la charge d’une équipe d’experts du ministère, la fermeture du site est une priorité. Je voudrais mettre en exergue la position du président de l’Assemblée Populaire Communale (APC) de Sétif qui s’est montré disponible à nous accompagner. La délimitation de la zone de protection de l’espace et du site de Mons fera l’objet d’un travail méticuleux. On ne ménagera aucun effort pour qu’aucun site ne soit souillé à l’avenir. A travers de telles démarches, nous voudrions faire de ces références historiques des lieux de pèlerinage où le tourisme culturel trouverait la juste place qu’il mérite dans la nouvelle feuille de route du ministère de la Culture et des Arts, pour lequel la protection du patrimoine culturel est un enjeu majeur pour le pays », précise notre interlocuteur.

Kamel Beniaiche 

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